mercredi 24 avril 2024

    Les Interviews de Gernier : Tom Larret

    Après MakuZoku qui est devenu un des piliers de mes deux sagas, le moment est venu de lever le voile sur une autre collaboration, très différente, qui a enrichi mes récits. 

    C’est que l’écrivain démiurge dans sa tour d’ivoire n’existe pas, et arrive toujours l’instant fatidique de présenter la première version de son épître à un lecteur avisé. Tom Larret est de ces personnes dont les retours pointus m’ont souvent poussé à m'arracher les cheveux dans des hurlements lupins terrifiants, me condamnant à me pencher une énième fois sur mon ouvrage.

    Évidemment, j’ai aussi relu dans la foulée son œuvre principale : les Chroniques de Guensorde. C’est au court de cet échange épistolaire électronique que nous avons sympathisé, nous rendons compte que nos deux univers ne sont pas si éloignés l’un de l’autre... Il était d'ailleurs fatal qu'Ethel Arkady rencontré le duo de Parques de Tom lors d’un amusant quatre mains… Il était donc temps que je lui offre une de mes pages, d’autant plus qu’elle m’a ouvert une des siennes il y a de cela un bail…

    Illustration par M-C-Illu

    Bonjour, Tom Larret, est-ce que tu peux te présenter pour les lecteurs qui ne te connaissent pas ?
    Bonjour, je suis romancière plutôt orientée dans l’imaginaire, même si je ne m’interdis pas à l’occasion de me frotter à d’autres genres plutôt pour le fun et l’expérience (oui, je me frotte de temps à autre à titre folâtre, et j’assume cette phrase). Il m’arrive aussi de publier des chroniques et des avis de lecture, mais sans la moindre rigueur ni ambition, et sous la surveillance de mon adjudant-chef. Après, je ne rédige pas une bafouille sur tout ce que je lis (par contre, je lis tout ce sur quoi j’écris mon opinion. Je sais, c’est con.) Hormis ça, j’aime le metal bourrin, les chiens, les poules et planter des campanules.

    C’est mieux de lire ce qu’on critique, effectivement. D’ailleurs, en dehors de tes romans, j’avoue que tes critiques ont le don de me faire rire. Tu utilises une certaine verve et un vocabulaire très riche, ce qui tranche avec le tout venant de ce qu’on lit sur le web. Du coup, j’ai envie de te demander d’où te vient cette faconde ?
    Eh bien, la réponse est un peu dans la question ! J’ai cette double volonté de faire rire et aussi de trancher. La critique passe souvent mieux avec une dose d’humour ; des auteurs que j’ai plus ou moins mordillés dans mes chroniques m’ont avoué que malgré ça, mes retours les avaient amusés aussi. Je pense également que le critique se pose, de façon volontaire ou non, comme un genre d’expert, et que pour cette raison, il doit faire preuve d’une grande rigueur dans le fond comme dans la forme. Après, j’admets que cela joue aussi contre moi ; j’ai un peu ce ton d’intello pédante à la Sainte-Beuve qui peut exaspérer ou décourager. Ça ne me dérange pas plus que ça ; je ne suis pas influenceuse, je ne formate pas mes contenus en fonction de l’attente du public. Alors, bien sûr, pour être honnête, j’aimerais bien que mes avis rencontrent plus de succès. Mais pas au point de simplifier ou de lisser ma façon de les rédiger ; ils n’auraient plus grand-chose d’authentique, et ça serait un peu méprisant envers ceux qui les lisent. Les lecteurs peuvent appréhender les mots de plus de deux syllabes, j’en suis convaincue !

    Pour le formatage, je confirme que tu y échappes, que ce soit dans tes fictions ou dans tes critiques, mais d’ailleurs... Je sais que tu as déjà fait un article sur lui, mais pourrais-tu nous dire qui est cet « adjudant-chef » qui te surveille ? Comment as-tu eu l’idée d’un personnage aussi saugrenu pour épicer tes critiques ?
    Ah, mon adjudant-chef ! C’est un mélange de personnes existantes et de mythes familiaux. Au début, j’avais simplement envie de caser des proverbes ou des citations détournées, et puis j’ai réalisé que je tenais là un triple bénéfice. Jouer avec les expressions, bien sûr, mais les aboiements de mon adjudant-chef me permettent aussi de me dégager un peu de ce statut « d’experte » dont je te parlais plus haut. Je retranscris des diatribes à mon égard du genre « Vous avez la cervelle aussi flasque et ratatinée que les valseuses d’un octogénaire, Seconde Classe Larret ! », je pense que ça atténue un peu la hauteur de grosse tête grammatisante qu’on pourrait m’attribuer. D’autre part, cette figure à la fois inquiétante et ridicule me permet de glisser des vannes qui seraient mal interprétées dans un style plus direct ; bien qu’on en ait déjà mal interprétées... Je cache sans doute sous son képi mon propre syndrome de l’imposteur, aussi... Enfin, c’est aussi un genre de gimmick à la mode WWF. Eh ouais ! la nuit, je suis une luchadora masquée.

    Avant d’aborder le gros morceau que constituent les Chroniques de Guensorde, je souhaite poursuivre sur ton site... J’avoue humblement que je n’ai pas tout lu, mais j’apprécie les petites pièces comiques et très métatextuelles que constituent les Parques Attaques... Est-ce que tu peux m’expliquer d’où elles viennent ?
    Parques Attaque, c’est une autre forme de critique, plus générale et peut-être moins professorale aussi. Une façon de pointer les clichés incohérents, les tropes politiquement obligatoires et autres poncifs de bon aloi ineptes qu’on retrouve chez beaucoup de romanciers, sans cibler quelqu’un en particulier. Bien sûr, les épisodes ont également un côté parodique, qui s’amuse avec les codes d’un genre donné (codes qu’il ne faut pas confondre avec les clichés, les uns sont des repères pour le lecteur quand les autres sont des facilités pour l’auteur). Je ne sais pas si c’est dû à l’explosion faramineuse du nombre de livres édités ces dernières années, à mes propres choix de lecture, ou bien à un lissage nauséabond de la pensée générale, mais j’ai très souvent l’impression de relire la même histoire, avec les mêmes personnages et les mêmes enjeux. J’avais envie d’éclater un peu toutes ces histoires hyper attendues, cette littérature au Nutriscore, sans sel, sans gras, sans gluten et sans idées, et c’est pour ça que j’ai envoyé mon duo d’andouilles mettre un peu le bordel là-dedans. J’ai choisi les personnages de « Parques » comme des représentants d’un destin un peu facétieux, et sans motivation précise, hormis les mystérieuses Plus-values Fatalité. Et, bien sûr, le mot en lui-même m’ouvre les portes béantes de l’univers infini des calembours débiles.

    Les facétieuses Parques par Tom Larret !

    C’est assez marrant qu’on en vienne à parler de cela, de littérature lyophilisée... Ce qui me permet de raccrocher un peu les wagons avec ton magnum opus à ce jour : les Chroniques de Guensorde. Malgré le fait que tu t’inscrives dans un genre assez balisé, j’ai autant été surpris par le style tout en arabesques byzantines, que par des séquences d’une cruauté ahurissante. Du coup, j’ai envie de te demander d’expliciter ces choix pour le moins risqués dans un genre – la fantasy – plein de possibilités, mais finalement assez frileux.
    Je t’avoue que je n’avais pas du tout conscience des « risques » autour de mes choix. Ma témérité de luchadora masquée, sans doute ! Je ne suis même pas sûre d’avoir fait des choix, au final (mon adjudant-chef désapprouve ce genre de choses). Concernant le genre littéraire des Chroniques de Guensorde, il s’est imposé à moi tout naturellement ; c’est de loin celui qui m’attire le plus, qu’il s’agisse de livres, de bandes dessinées, de films, de séries ou de jeux. Il y a dans la fantasy une dualité que je trouve assez fascinante : la liberté absolue qu’offre un univers complètement imaginaire, tout comme le travail intellectuel qu’il exige pour s’y plonger. Mais aussi l’évasion qu’il permet avec le réel tout en en proposant un reflet parfois très net. C’est probablement de là que viennent les séquences que tu soulignes.

    Ce type d’atrocités existe aussi ici, et en certainement bien pire ; la fantasy aide à les évoquer avec une certaine « distance de sécurité ». Mais d’après quelques retours, la distance est un peu courte pour certains lecteurs. C’est une affaire de goût, comme de sensibilité. Je ne cache pas les aspects sordides et brutaux de la saga ; j’ai collé une pastille « Pour public averti » en quatrième de couverture, et un traumavertissement sincère en première page. Je ne l’ai pas du tout pensé comme une accroche marketing, un « venez vous rouler dans les tripes et les larmes ». Même si je suis toujours ravie qu’on vienne se rouler, hein ! Ça correspond à ma vision de la littérature, de l’art en général, qui pour moi doit utiliser les constituants de la réalité sans pudibonderie, au service de l’émotion, voire de la réflexion. Il y a une vraie utilité à ces scènes dans les Chroniques, je ne les ai pas collées là par voyeurisme ou complaisance. Après, si on ne la perçoit pas, ça veut juste dire qu’il faut que je travaille plus dur !

    Enfin, j’ai voulu que le style soutienne le propos général, permette davantage de précision ou de profondeur, qu’il reflète aussi une certaine complexité inhérente à l’univers de Guensorde. La façon d’écrire, comme de dessiner ou de jouer, n’est pas un simple emballage cadeau autour d’une idée. La forme est une partie intégrante du fond. Là, encore, ça n’aide peut-être pas à l’accessibilité de mes textes. Mais j’ai assez de foi en l’intelligence humaine pour lui attribuer des capacités de compréhension allant au-delà de « sujet + verbe + complément ». Et, pour terminer sur une note d’honnêteté, le genre, le style et la noirceur, je les ai aussi choisis parce que ça me plaît. La fantasy est un univers de liberté pour tous ! Là, j’ai poussé mon cri de luchadora masquée, mais il est difficile à retranscrire.

    J’avoue que j’aime me rouler dans les tripes et les larmes, de mon côté, donc tout cela ne me choque pas trop. D’ailleurs, un autre truc qui m’a frappé, outre une montée en puissance de ton style, c’est que finalement, on s’attache aux pas d’une des pires ordures de la fantasy, j’ai nommé Anverion. Qu’est-ce qui a motivé la création de ce personnage abject ?
    J’avoue que l’Anverion final qu’on découvre dans la saga est un peu moins sympathique que ma première idée. Le personnage a pas mal évolué au fur et à mesure de mes lectures pour préparer le premier tome. À l’origine, je m’étais plutôt inspirée de tout le mythe construit autour d’Alexandre le Grand, avec toute la complexité et la fascination qu’évoque sa figure historique. Mais au contraire du Macédonien, qui se réclamait certes d’origines divines sans prétendre être lui-même un dieu, Anverion, lui, en est un. Lui donner un caractère nuancé, avec des émotions et des ambitions entremêlées, une propension égale ou variable au bien comme au mal lui aurait aussi octroyé une certaine forme d’humanité, qui ne convenait pas vraiment à la monarchie de Guensorde. Par conséquent, j’ai ajouté quelques poignées du Caligula de Dion Cassius et de celui de Jean-Yves Boriaud entre « démesure et dérision », une bonne rasade Louiquatorzienne, un zeste de Charles VI et d’Ivan le Terrible, j’ai fait cuire le mélange dans un moule de fanatisme religieux, et j’ai nappé le tout des pires grumeaux de « l’éducation positive ».

    Au final, sa nature divine, sa situation sociale et son histoire personnelle ont donné cette espèce de psycho-sociopathe que son entourage déteste adorer ! En outre, je ne voulais surtout, surtout pas lui donner de « ticket retour » magique parlepouvoirdelamourlamitié, du genre qui balaie les valeurs et le caractère d’un personnage en un bisou sur la joue. C’est un trope parfois positif, mais qui ne fonctionne que dans la littérature jeunesse ou feel-good, le vilain qui devient gentil parce qu’on l’aime. Je ne porte pas ici de jugement de valeur sur ces genres littéraires, mais je trouve que ledit cliché vire souvent à la croyance dangereuse dans les autres registres, surtout lorsqu’il s’insinue dans les représentations du monde réel. Non, messieurs-dames, il ne suffit pas d’aimer très fort votre partenaire pour en finir avec ses coups de poing dans votre museau ou ceux des autres. 

    Illustration par M-C-Illu

    Jolies références pour ton « antagoniste » principal ! Je vais me permettre une digression : il m’apparaît que ce cliché, du bad-boy, de préférence riche ou à une position de pouvoir élevé, qu’une jeune et jolie demoiselle va remettre sur le droit chemin se retrouve beaucoup dans une certaine littérature, en particulier qu’on appelle « Young Adult », bien que je déteste aussi ce genre d’étiquette. Non que j’apporte quelques croyances à l’influence de la fiction sur les âmes – ce serait à mon humble avis nous accorder une trop grande importance aux saltimbanques que nous sommes – mais je me demande si, à force de « répéter un mensonge », ainsi que l’a prophétisé un homme dont je tairais le nom, celui-ci ne devient pas une réalité. Parce que de ce côté-là, et même si je loin d’avoir eu le courage de tout lire dans le genre – qui ne m’intéresse pas beaucoup – j’ai la sensation que ta posture critique sur ce stéréotype est plutôt unique en son genre...
    Je suis d’accord avec toi, c’est un type de personnage qu’on retrouve énormément, dans la littérature à destination des grands adolescents, mais également dans tous les types de romance. La figure de la rédemption par l’amour n’est pas spécialement nouvelle, mais ce que je constate de plus en plus, et qui motive ma critique, c’est que ladite rédemption n’est plus le fruit d’un effort sur soi-même ou d’un chemin parcouru, ni même d’une évolution globale, car elle ne s’effectue qu’au sein du couple, et pas à d’autres niveaux.

    Et à force de se multiplier dans la fiction, ce genre de personnalité comme de relation est devenu un modèle à suivre, un idéal à imiter, un but à atteindre, puisque présenté comme la base d’un bonheur délirant. J’y vois deux messages assez toxiques s’ils sont pris sans recul : « si votre partenaire n’est pas une bonne personne, changez-le ou la » d’un côté, et « si votre partenaire vous aime vraiment, il ou elle tolérera tous vos comportements, même les plus abjects » de l’autre. Je comprends tout à fait le fantasme du mauvais garçon (ou de la femme fatale) qui se transforme par la passion ; mais pas qu’on l’érige en parangon de l’amour heureux et parfait en un battement de cils. Hélas, pour avoir travaillé avec les « jeunes adultes » en question, je te confirme que ce cliché façonne bien une certaine norme dans la vision du couple. Je m’étais un tout petit peu enflammée à ce sujet sur mon blog, d’ailleurs. C’est aussi pour ça que j’ai voulu proposer une évolution différente pour Anverion, en décalage avec la version romancée habituelle. Et beaucoup plus proche de ce qui arrivera à ta sœur ou à ton voisin face à des comportements de cet acabit.

    Merci pour ta réponse développée à laquelle j’adhère totalement. Tant que nous sommes dans les arcanes de Guensorde, une autre chose qui m’a surpris de manière très agréable, c’est que ton héroïne se détache un peu du tout venant : elle possède des connaissances scientifiques, elle demeure assez intelligente, et pourtant elle possède beaucoup de failles, ce qui la rend assez touchante. Est-ce que tu peux nous expliquer comment t’es venu ce personnage ?
    J’avais envie d’écrire l’histoire d’un personnage avec des capacités assez poussées, mais pas au point de lui permettre de surmonter seule toutes les difficultés. J’ai tendance à me détacher des héroïnes ou héros trop doués ; lorsqu’on comprend après dix pages (ou dix minutes de film) qu’ils sont capables de tout réussir, de tout affronter, puis de s’en sortir comme des fleurs, tout frais tout propres et bien coiffés, je ne vois plus aucun intérêt à suivre leurs aventures. Je ne souhaitais pas non plus un personnage de combattante, je voulais lui donner d’autres compétences que l’endurance, le courage, l’adresse aux armes ou la force physique, qui lui seraient tout aussi utiles, mais d’une manière bien différente. 

    J’ai tenté de lui donner en outre des traits de caractère qui la desservent réellement, voire la mettent en danger, et pas de pseudos-défauts comme la fameuse impétuosité qu’on retrouve dans de nombreuses descriptions « d’héroïnes badass », qui n’est qu’une qualité maquillée sans aucune conséquence sur leurs destins ou leurs choix. Au début de la saga, Aldanor est complètement infoutue de la fermer, de réfléchir avant de parler, ou de retenir ses interventions. Bien qu’elle comprenne très rapidement que le silence, un choix de mots plus avisé ou une inaction temporaire la garderaient en sécurité, elle a le plus grand mal à s’y résoudre, et cela lui coûte assez cher. Elle ne parvient pas non plus à remettre en question son système de croyances et de valeurs ; lorsqu’il entre en contradiction avec ses analyses ou ses apprentissages, elle parvient toujours à les déformer de façon à rester cohérente avec elle-même. Pour éviter de reconstruire totalement sa personnalité, elle se trouve toujours une bonne raison de tendre l’autre joue, si tu préfères. 

    Enfin, j’ai aussi essayé de tordre le cou à l’image que les victimes d’emprise se font d’elles-mêmes, comme à celle que la société leur renvoie en général. Qu’il s’agisse d’une manipulation sentimentale, amicale, professionnelle, spirituelle ou religieuse, celles et ceux qui s’en sortent se demandent toujours « comment ai-je pu être aussi bête ? ». Et, lorsqu’on n’y a pas été confronté, on a tendance à penser que les membres d’une secte, les cibles des brouteurs, etc... ne sont pas les couteaux les plus affûtés du lave-vaisselle. Aldanor est une femme intelligente, cultivée, avec des capacités de raisonnement efficaces, mais elle fait face à des pratiques d’instrumentalisation qui utilisent d’autres ressorts psychologiques, qui jouent davantage avec les affects ou l’émotion que l’intellect et la réflexion, et qui les mettent complètement en déroute. Avec du recul, ça donne une impression de grande stupidité. Pourtant, assiégé par les techniques certifiées et bien maîtrisées des gourous, des dictateurs ou de n’importe quel manipulateur malveillant, que tu sois Prix Nobel de physique, champion du monde d’échecs, lauréat du Goncourt ou autre HPI, je ne miserai pas un centime sur toi.

    Illustration par M-C-Illu

    J’avoue qu’Aldanor m’a parfois crispé dans sa manière de se voiler la face, mais comme c’est voulu de ta part... Je te tire mon chapeau. On a abordé pas mal de sujets intéressants, mine de rien, mais je me demande... Quelles sont tes influences littéraires ? Les auteurs (même les cinéastes ou les dessinateurs, je ne suis pas sectaire...) qui t’ont le plus influencée ?
    Pour la saga de Guensorde, je citerais G.R.R Martin en première position, pour le côté réaliste et sans pitié de son monde (assez aseptisé dans la série télévisée, d’ailleurs, mais particulièrement rude et complexe dans les livres), et une certaine circonspection avec l’usage de la « magie ». Souvent, sortilèges et invocateurs se pavanent en fantasy, j’avais apprécié leurs restrictions et leur rareté dans Le Trône de Fer. De mon côté, c’est moins un vœu de subtilité qu’une difficulté à gérer tout un système de pouvoirs surnaturels. Hormis les Incarnés, qui tiennent plus des créatures fantastiques que des mages, j’ai tenté de l’imiter et donc de limiter.

    J’avais aussi été très marquée par les trois volumes des Enquêtes de Télamon de Paul Doherty, et, en ayant relu La Mort sans Visage il y a peu, je n’avais même pas imaginé le nombre de parallèles inconscients que j’ai faits dans Le Sceptre et la Lancette ! Après, je suis une grande admiratrice des classiques ; c’est peut-être moins sensible, mais j’adore Hugo, Corneille, Virgile et consorts... Ils ont tous les trois droit à leurs clins d’œil enamourés, d’ailleurs, dans la quadrilogie. Pour sortir un peu des auteurs, j’avoue que j’y ai glissé énormément de références à l’univers metal (et pas seulement quand quelqu’un se met à chanter). En ce qui concerne les aspects plus visuels, je pense que les atroces distorsions physiques des corps dans les dessins d’Otto Dix ont probablement dû façonner celles de mes Incarnés, ainsi que les ravages qu’ils font. Et enfin, j’ai sorti pas mal de calembours de mon propre héritage familial, car mes turlupinades lexicales se transmettent de génération en génération.

    Je te remercie pour tes réponses, même si j’avoue ne pas être très fan de GoT ! J’avais une dernière question : quand on suit un peu ton site, on remarque que tu t’essaies souvent à des mises en page ou à des illustrations, est-ce que cela nourrit aussi ta narration ?
    Moi la série m’a laissée assez mitigée, mais j’avais bien aimé les romans malgré l’aspect touffu des intrigues dont j’ai eu du mal à me dépêtrer. Après, j’aime bien quand c’est touffu.
    En ce qui concerne la mise en page et l’illustration, de mon côté, ça obéit à des impératifs de communication presque assez bêtes et méchants pour les confier à une IA. Presque. Disons que ça n’est là que pour mettre en valeur une de mes publications, et respecter les codes d’internet où l’image et la vidéo attirent presque seules l’attention. J’aime bien bricoler sur Illustrator de temps en temps, mais je n’ai pas la patience, la formation et les compétences d’un vrai professionnel. Toutefois, je préfère quand même mes résultats aux tas de pixels fades et répétitifs que produisent Midjourney et consorts.
    Lorsque j’ai vraiment besoin d’une illustration porteuse de sens et de créativité, comme pour mes couvertures, je préfère l’acheter à une personne talentueuse et sérieuse avec qui je peux échanger. Non seulement j’obtiendrai quelque chose de conforme à ma première idée, mais bien plus esthétique que ce que je suis capable de faire, et enrichi par une vision artistique différente. Pour celles de Guensorde, j’ai fait appel à M-C-Illu. J’avoue que j’aimerais bien confier toute ma « communication visuelle » à un graphiste ou un dessinateur de métier, mais c’est un investissement que je ne peux pas me permettre. Pour l’instant ; comme mes ventes devraient logiquement exploser suite à cette interview, je prépare d’ores et déjà mes annonces de recrutement, ainsi que l’emplacement de ma future piscine et la commande des 25 000 hectolitres de crémant de Loire pour la remplir.

    Je te remercie pour ta participation ! Du coup, je pense que cela conclut ce très intéressant entretien. Est-ce que tu aurais le mot de la fin ?
    Ben... à table. 
     
    L'intégralité (ou presque) du pléthorique casting de Guensorde par Tom Larret.

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