jeudi 16 octobre 2025

    Les Chroniques de Yelgor : Allytah & Eldridge

    Malgré les calamités qui s’abattent sur mes épaules comme la misère sur le bas peuple, je ne renoncerai jamais à l’art ! Heureusement, certain jour, de bonnes nouvelles tombent, quoique l’impact de celles-ci s’avère d’une importance toute relative pour le commun des mortels, mais pour votre serviteur, elles revêtent la forme d’un émerveillement qui l’extirpe de la boue d’un labeur de plus en plus frustrant et vide de sens. Ainsi cette nouvelle illustration vous emmènera tout comme moi dans le Royaume de Yelgor pour la suite des aventures d’Allytah et de ses amies ! 

    C’est l’artiste Huba, qui a officié sur le Dîner en Ville, qui s’est chargée de sa composition, et j’en suis très content ! Il reviendra pour d’autres histoires, étant donné que cette collaboration s’annonce fructueuse. Il s’est bien emparé du personnage pour cette image glaciale dans laquelle notre Noctule explose dans une colère homérique contre le chevalier Eldridge qui n’en demandait pas tant. J’apprécie sa reprise, d’autant qu’Allytah s’est déjà bien cristallisée : il a donc dû trouver l’équilibre entre sa propre vision et l’esprit du personnage, ce qui demeure un exercice mental loin d’être évident en plus d’une certaine humilité. Malgré cela il a su lui insuffler autant de puissance que de féminité à fleur de peau. 

    J’aime toujours autant me perdre dans cet univers, lequel se détache peu à peu de la fantasy « pure et dure » pour voguer sur le territoire de la science-fantasy apocalyptique et crade, tout en conservant des rogatons de gore. On ne se refait pas ! Une soupe bien épicée et étrange qui me correspond, bien que je vous confesse être bloqué devant un dilemme : le récit principal s’étend sur plus de 600p. au format « livre de poche » et je m’aperçois que je ne suis pas encore arrivé à la moitié du second tome. Là où le premier était sec et sans fioriture, étant donné qu’il a été conçu dans un cadre performatif et que donc mes choix esthétiques ont découlé ces conditions, imposant presque l’emploi d’un huis clos, cette suite se mue en une envie d’exploration tous azimuts, hantée par une multitude de personnages, or, en termes de romans plus tentaculaires que le grand Cthulhu lui-même, j’avoue que je sature un peu.

    Du coup, j’aimerais le couper, mais voilà, où placer la césure ? Les deux temporalités sont liées de façon inextricable (Allytah explique comment elle a perdu son bras dans un duel contre sa sœur pendant son exode hivernal) et je n’ai pas atteint de climax dramatique qui me permet de trancher dans cette abondante matière avec élégance. Ou alors, je sépare les deux histoires, mais cela perturbe l’équilibre des deux récits enchâssés (une autre de mes marottes), puisque le premier (le présent) est narré de manière omnisciente tandis que le second est raconté par Allytah elle-même. Le fait que ce soit la conteuse de ses aventures justifiait l’emploi de la première personne – puisque c’est sa sensibilité et subjectivité qui mène le tempo –, mais sans son intervention ce choix s’avère moins pertinent et m’obligerait à tout réécrire. 

    Qu’est-ce que vous préféreriez, vous ? Que je coupe au hasard, après un nombre de pages définies arbitrairement par une IA dépressive, ou que je vous abandonne sur un cliffhanger putassier digne de J.J.Abrams ? À moins que je ne vous laisse après un climax cathartique (ce qui demandera plus de pages, mais vous êtes venu là pour souffrir, non?) ?



    mercredi 8 octobre 2025

    Les Aventures d'Ethel Arkady : Pornopolis : Himiko & Arkady

    Après quelques semaines d’attente, voici venir une seconde illustration d’Horlod pour Pornopolis ! Et j’en suis ravi, même si ma pauvre Arkady se retrouve dans une situation pour le moins préoccupante. Le dessinateur s’est pour l’occasion approprié la fameuse Akemi Himiko, grande ordonnatrice des supplices de l’institution éponyme et par ailleurs une redoutable séductrice ensorcelant quiconque l’approche. J’aime beaucoup cette version, en particulier ses gants très particuliers qui serviront au rituel en court. Je lui confierais encore le personnage pour de nouvelles zaventures ! 

    J’en avais déjà causé en ces lieux, mais j’adore Akemi Himiko et elle se pose souvent en une vénéneuse friponne pour Arkady, à un tel point que je les ai mises en duo dans un Dîner en Ville, court roman que je compte sortir pour début 2026.

    D’ailleurs, comme j’apprécie son style, je poste aussi une des recherches dans laquelle nos deux protagonistes se jaugent, même si notre féline préférée n’a pas le dessus dans l’affaire… À moins que tout cela ne soit qu’illusion ? Vous le saurez dans la seconde partie de Pornopolis ! Cependant, celle-ci me demandera encore pas mal de travail. J’espère déjà achever le premier volume dans le courant 2026, donc le second requerra quelques années de lutte avant d’atteindre la ligne d’arrivée éditoriale. 

    Ces dessins soulèvent un pan du voile opaque qui entoure l’intrigue en cours de création et témoignent de mon avancement, même si la réalité et mon ingrat boulot alimentaire sont bien décidés à me pourrir l’existence. Mais je ne lâcherai pas la barre de mon navire ivre et je souhaite que ces saynètes vous donnent envie de rejoindre mon univers déglingué ! Certes, il ne conviendra pas aux estomacs fragiles, mais il possède ses noirs merveilles que vous ne trouverez nulle part ailleurs !

    L’image complète demeurant quelque peu tendancieuse (euphémisme), je n’ai propose que des morceaux ici, mais vous la découvrirez sur le second blog consacré aux travaux un peu plus salés ! 


     
    Esquisse d'Horlod que je trouve très sympa, donc je la met là !

    Le pentacle d'Himiko qui se trouve sur le sol !


    lundi 8 septembre 2025

    Les Aventures d'Ethel Arkady : Pornopolis : L'Invocation

    J’aime les dessins très typés, et cela vaut autant pour des illustrations qui se rapprochent d’une forme de « réalisme » – avec tous les guillemets nécessaires à cette appellation non contrôlée – que pour des graphismes plus radicaux, comme l’esthétique punk de mon vieux complice ExpExp. Cependant, son style requiert une séquence qui corresponde à sa personnalité artistique. Je lui ai donc confié un chapitre assez particulier de la deuxième partie de Pornopolis, dans lequel la sexualité ne joue qu’un rôle mineur.

    Dans ce passage, nous entrons dans un moment charnière de l’histoire : notre chère Ethel Arkady sort de son enveloppe corporelle et explore sous la forme d’une projection astrale les secrets qui se cachent sous les entrailles de Pornopolis. Elle y découvre tout un monde abyssal grouillant de créatures qui ne ressemblent à aucune forme de vie connue dans notre « réalité physique ». Cette séquence cite de manière très explicite Lovecraft – qui reste une des grosses influences littéraires chez moi, et dont le poids thématique imprègne une large partie du fantastique contemporain, mais peut-être pas dans le sens où l’entendent beaucoup d’exégètes de l’auteur.

    En effet, je trouve que l’on réduit un peu trop souvent Lovecraft à un ensemble de « tentacules, grimoires maléfiques, et racisme décomplexé ». Or, la plupart du temps, il est plutôt question de la peur devant l’inconnu, mais surtout de ce qui arrive à notre esprit limité lorsque nous comprenons la vastitude de l’univers et de son extrême indifférence à notre destin, un credo qui accomplit par la même le plus beau doigt d’honneur à l’humanisme, lequel prétend au contraire mesurer la réalité à l’aune de notre anthropocentrisme. Bien sûr, il existe d’autres thématiques au sein de son œuvre, mais je ne reviendrai pas sur celle-ci dans cet article. Si vous ne l’avez jamais abordé, je vous invite à explorer cette œuvre singulière[1].

    Mais je ne suis pas là pour établir une exégèse lovecraftienne, bien d’autres s’y sont attelés, avec bien plus de talent… [2] Comme exemple, je prendrais en exemple deux longues novellas qui m’ont marqué : Les Montagnes Hallucinées & Dans l’Abîme du Temps. Dans ces histoires cohabitent tout autant l’horreur et la fascination que Lovecraft éprouve pour une altérité non anthropomorphique. Car ni les Anciens, ni les membres de la Grande Race de Yith ne sont vus comme des entités maléfiques. L’auteur décrit leurs sociétés complexes avec une gourmandise sincère et surtout, un talent rarement atteint dans ce genre d’exercice, esquivant tous les pièges tendus par une logique anthropocentriste instinctive. Et pour moi, ces deux récits marquent une forme de jalon dans le corpus Lovecraftien. Bien sûr, on retrouve la peur de l’inconnu, et surtout celle du temps qui traverse toute son œuvre, mais aussi une recherche littéraire qui poussera dans ses derniers retranchements l’art de la description. C’est une chose de peindre l’humanité, c’en est une autre, très complexe, de représenter au mieux des êtres sortant complètement de notre appréhension sans y poser aucun jugement superfétatoire. Un paradoxe, quand on y songe, pour un auteur qui adoptait les opinions les plus réactionnaires de son époque. 

    Bon, mais où cette diatribe se dirige-t-elle ? J’y viens ! Je pense que de mon goût de l’horreur, du fantastique et de la fantasy, découle le fait que – en dehors de leurs aspects les plus servilement commerciaux – ces genres sont les plus à même d’explorer la radicalité sous toutes ses formes. Cependant, il ne faut pas confondre la radicalité avec quelque chose de violent ou de sexuel [3], non ! La radicalité, de manière étymologique constitue un retour à la racine, à l’essentiel. Or dans cette séquence, j’offre à Arkady un voyage vers les abysses, dans une chute sans fin vers le fond des océans, sans autre objet que cette rencontre avec une forme de vie incompréhensible pour elle. Je célèbre ainsi un écrivain auquel je dois un de mes plus puissants chocs artistiques. En retournant aux origines de son imaginaire et en l’interprétant de manière un peu oblique par rapport à tout ce qui a été déjà produit. Je me suis beaucoup amusé lors de la rédaction de cette plongée et elle répond à un autre chapitre qui se trouvera dans la Chauve-Souris d’Or, une aventure d’Arkady dont je causerai un de ces jours… 

    ExpExp s’est déchaîné sur cette illustration en réalisant un tableau ahurissant, presque abstrait, mais pourtant plein de la folie que je voulais incorporer à mon texte. Comme à son habitude, il a produit moult variations sur le même canevas que je vous propose ici !



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    [1] - Ainsi que celle de ses confrères qui lui ont emboîté le pas comme Robert E. Howard, Fritz Leiber, Frank Belknap Long, Robert Bloch et d’autres encore… Lovecraft a partagé sa création avec une foultitude d’auteurs de cette époque. En revanche, sauf si un désir de complétude vous y exhorte, les continuations du corpus lovecraftien par August Derleth s’avèrent aussi dispensables que problématiques pour la compréhension de celle-ci. De fait, si Derleth a réussi à sortir Lovecraft de l’anonymat en fondant une maison d’édition à sa gloire, il a commis des nouvelles et quelques romans en utilisant son univers pour l’ordonner dans le sens dans lequel il l’entendait, c’est-à-dire une stupide lutte du bien contre le mal. Catholique convaincu, Derleth avait une lecture biaisée de Lovecraft et même si on lui doit quelques bonnes histoires, la culture populaire a saisi le fameux « Mythe de Cthulhu » par cette ornière erronée  !

    [2] - Les éditions ActuSF ont enfin traduit la biographie de H.P.Lovecraft « Je suis Providence », une énorme masse d’informations tentaculaire de 2 400 pages qui vaut le déplacement pour les admirateurs les plus acharnés de l’écrivain. Cet ouvrage corrige d’ailleurs certaines approximations et contre-vérités sur le personnage qui continuent de circuler sur le web.

    [4] - Bien que je plaide coupable dans le cas de Pornopolis !