samedi 6 juillet 2013

    Comment la Bit-lit émascule le cinéma fantastique... part 2 : Des années 60 à 70 : Entre traditions, irrévérences et Comédies.

    Avec le déclin de la Hammer, tout un pan de la mythologie vampirique s’écroule. Dracula, en dehors des quelques remakes marginaux, restera un phénomène anglais. Jusqu’à la fin des années 60, les films de vampires appartiendront surtout à la vieilles Europe, puis les Etats-Unis entreront  à la fin dans le bal pour apporter une transfusion de sang neuf. 



    Si le sang et la jouissance perverse appartiennent à l’archétype du vampire, il lui faut une position sociale élevée pour se repaître en toute quiétude de ses proies. Rarement exploitée, l'immortalité demeure une thématique conceptuelle à l’inverse de la hiérarchie et de la sexualité.

    Ce n’est pas un hasard si Dracula s’enorgueillit d’origines aristocratiques. Ce cachet lui confère le prestige nécessaire pour s’infiltrer parmi les hommes. Fantasme d’une élite se nourrissant littéralement du peuple, Dracula et ses émules symbolisent les derniers soubresauts d’un pouvoir qui change de mains, les nobles passant au second plan dans la direction du monde.

    Avec la chute de la maison de production Hammer, le vampire se quitte les oripeaux de sa condition de gentilhomme. Ainsi Roman Polanski fait tomber de son piédestal dans le Bal des Vampires, se jouant de nobliaux poussiéreux incapables de planter leurs crocs dans le cou d’un Van-Helsing souffreteux. George.A.Romero, le maître du zombie consumériste cannibale remonte même aux sources psychopathologiques du mythe en le déboulonnant dans le trop méconnu Martin transformant le vampire en un adolescent fluet et complexé.

    Pendant les années 70, malgré de nombreux films reprenant tant bien que mal les recettes éprouvées, le vampire sera trituré, assaisonné à toutes les sauces. Du surréalisme érotique et envoûtant d’un Jean Rollin aux comédies « prout-prout », le personnage va perdre ses canines et essuyer des plâtres au box-office. Face à la modernité, notre saigneur se métamorphosera en un épouvantail ringard qui sera rangé avec ces comparses monstrueux de la Universal au fond du placard. 

    Commencera dans le cinéma fantastique et d’horreur le règne des psychopathes et des zombies. Seul le film Lemora : A Child’s Tale of the Supernatural de Richard Blackburn reviendra aux sources du mythe avec l'évocation d'une troublante comtesse sanglante dont les inclinaisons sexuelles déviantes la poussent à s’attaquer à… des enfants ! Cette production hardie écopera longtemps d’interdits dans plusieurs pays. Son auteur ne concrétisera plus d'autres projets pour le grand écran après ce coup d'éclat.

    Pendant quelques années les vampires déserteront le paysage cinématographique. Ils renaîtront de leurs cendres, transcendés, au début des années 80 avec Les Prédateurs de Tony Scott. Désormais regroupés en corporations ou en tribus, les vampires adopteront le style de vie des yuppies…

    Jonathan Frid cabotine un maximum dans le rôle
    du vampire Barnabas Collins dans Dark Shadow.


    Tube Cathodique. 1966 : Dark Shadow de Dan Curtis.

    Le vampire n’échappe au petit écran, même si les règles de censures qui régissent son univers rendent délicate la mise en scène d'histoires d’horreur efficaces. Néanmoins, certains créateurs de série parviendront à s’extraire de l’épais carcan des productions télévisuelles.

    Dark Shadow narre les aventures d’une famille dysfonctionnelle, les Collins, dont l’un de leurs membres est un vampire dans la grande tradition du genre. Soap-opera fantastique, cette œuvre OVNI comporte 1225 épisodes. La mise en scène catastrophique, dût aux délais effrénés de tournage laisse apparaître les perches, les trucages approximatifs et autres sautes d’axes intempestives. Ce traitement lapidaire l’empêche d’être accessible au public d’aujourd’hui. Elle connaîtra néanmoins le succès grâce à l’acteur Jonathan Frid qui conférera au vampire Barnabas Collins sa folie et son cabotinage ainsi qu’à des scénarios débordant de fantasmagories, compensant des moyens financiers lacunaires. 

    La série donnera naissance à deux adaptations cinémas qui sortiront en 1970 et 1971 [1]. Elle sera remaniée en 1991 dans une nouvelle saga condensant les différentes trames principales en 12 épisodes. Enfin, Tim Burton réalisa sa propre version en 2012.



    1967 : Le Bal des Vampires de Roman Polanski.

    Roman Polanski signe ici un film important qui marquera les débuts d’une dérive du genre en posant la thématique des sociétés vampiriques. Initialement dépeint comme une figure du mal solitaire, Polanski métamorphose les vampires en êtres sociables se réunissant en grande fratrie de saigneurs. Anne Rice et d'autres écrivains puiseront à cette source pour créer leurs univers, construisant une approche communautaire qui va se révéler déterminante dans l’avènement de la Bit-Lit.

    Comédie virtuose, le Bal des Vampires détourne avec un humour mordant les poncifs des productions Hammer tout en respectant le genre. Les décors, la prestation des acteurs ou la narration languide que Polanski pousse à l’extrême les poncifs du fantastique gothique. Habile, le scénario installe un réel suspens et des enjeux fatals pour les tueurs de vampires maladroits. Les mimiques grotesques d’un vampire homosexuel peuvent, le temps de quelques séquences, devenir terrifiantes. 

    Autre signe de l’esprit de divorce avec la tradition, Polanski va accorder le mot de la fin aux créatures de la nuit. Cette rupture avec la tradition provoquera l'émergence d'un nouveau comportement pour nos créatures. L’ambition première de Polanski de clouer une bonne fois pour toutes le cercueil du vampire engendrera ironiquement un profond bouleversement dans les us et coutumes du monstre. 



    1968 : Le Viol du Vampire de Jean Rollin.

    Tourné en noir et blanc pour la modique somme de 300 000 francs français, ce film peut-être considéré  comme la première production touchant aux vampires dans le paysage français. Doté d’un scénario labyrinthique construit au jour le jour, Jean Rollin y rend un vibrant hommage aux feuilletonistes du 19e siècle. Il se débrouille avec les moyens du bord pour insuffler à ses pellicules une ambiance bizarre à nulle autre pareille. L'érotisme léger et le jeu ampoulé des acteurs bâtissent un monde atemporel dans lequel tout devient possible. 

    Les monstres de Jean Rollin sont manipulées par des humains espérant obtenir l’immortalité. La lumière du jour aveugle ses créatures, les privant de leurs pouvoirs. Cette image récurrente du vampire à la fois victime et prédateur se propagera sur une bonne part de sa filmographie. Fantasques, aussi amorales que fragiles, les vampires de Rollin ne tirent guère de profit de leurs conditions.

    Phillipe Druillet, ami de Jean Rollin,
    réalisera la majorité de ses affiches.


    Ces variations poétiques sur le thème vampirique sortent le personnage de ses stéréotypes pour s’aventurer hors des sentiers battus. Le réalisateur prolongera son univers dans des romans qui lui permettent de ciseler des péripéties spectaculaires qu’ils n’auraient jamais pu concrétiser sur grand écran, ses tournages dépendants surtout du système D. 

    Méprisé en France, Jean Rollin connaîtra un petit succès en Angleterre, mais sa vision particulière du vampire, onirique et érotique, ne perdurera pas. Seul contre tous, en pleine explosion de la nouvelle vague, Jean Rollin s’accrochera à ses légendes, composant des métrages touchants, empreints d’une langueur poétique avec des miettes de budget… Jusqu’à sa mort.

    1970 : Vampyros Lesbos de Jess Franco.

    Avec son contexte de sexualité hypertrophié, il était logique que le vampire rencontre quelques auteurs portés sur la fesse facile. C’est chose faite avec Jess Franco qui réalise ici un navet insupportable dont l'unique signe de vampirisme demeurera une tâche de confiture de framboise sur un rideau. La bande originale ravira les oreilles des amateurs d’obscurs groupes des années 70 mais il n’y a rien à sauver de cette catastrophe dont la signature stylistique à base de zooms fulgurants donne vite la nausée…





    Avec Jean Rollin en France, Harry Kümel est l’un des rares réalisateurs européens a s’aventurer dans le film de genre. L'action des Lèvres Rouges se déroule à Ostende dans laquelle Erzébeth Bathory s’installe avec sa suivante. Dans un style onirique, le flamand conte les méfaits de la comtesse qui se prend d'une passion dévorante pour une jeune mariée.

    Harry Kümel soigne ses ambiances bariolées pour obtenir un onirisme baroque traversé par un zeste d’érotisme feutré. Le cinéaste offre à la Comtesse Sanglante un bel écrin où les éclairages à dominante rouge marquent les apparitions de la vampire. Il filme la ville d’Ostende comme un sinistre dédale vidé de sa population qui se métamorphose vite en un gigantesque château, lequel obéit aux volontés de la comtesse et égarent les inconscients promeneurs…

    Si l’œuvre souffre de quelques longueurs, le réalisateur n’en essaye pas moins de redorer avec un certain panache le blason du vampire.




    Production tardive de la Hammer dont l'ambiance foraine rappelle le roman de Ray Bradbury : La Foire des Ténèbres. Cette inspiration offrira quelques scènes oniriques du plus bel effet. La narration hésite entre le soutien aux monstres et le camp des villageois. Tout comme dans le Bal des Vampires, les créatures vivent en groupe et chassent ensemble. 

    La thématique communautaire s’introduit lentement dans les fictions vampiriques. Malgré tout le savoir-faire de son réalisateur, le Cirque… demeure une petite production handicapée par un manque de budget flagrant. Ces écueils économiques ne modifient cependant pas la qualité d’une intrigue solide et d’une réalisation efficace.



    1972 : Blacula de William Crain.

    Adaptation à la mode Blaxploitation de Dracula, Blacula ne vaut pas grand-chose. Malgré un très beau générique animé, le film n’apporte pas de grandes innovations au mythe. Seules quelques scènes musclées, dont le massacre des goules par un groupe de Van-Helsing en coiffure afro, réveillent notre intérêt… Maigre bilan.




    1974 : Du Sang pour Dracula de Paul Morrissey.

    Pantalonnade qui déboulonne le Comte Dracula, ce film a surtout bénéficié de la caution artistique de son instigateur, Andy Warhol. D’art il n’est point question ici puisque le réalisateur assure à peine le minimum vital pour garder éveillé son spectateur. La trame, simpliste, fait de notre vampire préféré incarné par Udo Kier en roue libre, une créature malingre que le manque de femme vierge a condamnée à l’inanition. 





    Réduit à lécher le sang des menstrues dans les latrines, le comte finira sa pathétique existence sous les coups de hache d’un bellâtre, piteux ersatz de chasseur de vampire… Grotesque, mal tourné et saupoudré d’effets spéciaux cheaps, ce film ressemble à une gueule de bois après une longue soirée de beuverie. 

    1975 : Lemora : A Child’s Tale of the Supernatural de Richard Blackburn.

    Métrage méconnu d’un auteur qui ne remettra le couvert que pour la courte série « Tales from the Darkside », ce film s’attirera les foudres de la censure dans plusieurs pays à cause de son intrigue. Exhumé en France par une poignée de distributeurs, le film de Richard Blackburn deviendra un film culte. Sa réputation sulfureuse provient de son intrique ; à la recette de lesbianisme qui accompagne toutes les apparitions des femmes vampires, Blackburn fera de sa créature une ogre se repaissant de la jeunesse et l’innocence d’enfants.

    Dès les cinq premières minutes un univers envoûtant suinte de la pellicule. On assiste à un croisement entre les ambiances à la manière de Lovecraft pour la ville hantée par des habitants déformés et celui d’un Lewis Carroll cauchemardesque lorsque la petite héroïne, sur les traces de son père, tombe de Charybde en Scylla.

    Si certains réalisateurs choisissent l’angle de la comédie, Blackburn exploite son sujet avec un sérieux papal. Il adjoint aux mythes vampiriques quelques idées tirées de ses influences, ce qui finit par créer une alchimie inédite et redoutable. Ainsi les villageois d’Astaroth, un nom lourd de signification, sont-ils tous victimes des maléfices de Lemora. La démarche claudicante et le faciès grisâtre de ces goules d’un nouveau genre évoquent ceux de la nouvelle Le Cauchemar d’Innsmouth de Lovecraft dans laquelle tous les habitants d’un port de pêche se métamorphosent en monstres sous l’influence de créatures venues de la mer !

    Sublimé par un magnifique technicolor, Lemora propose une variation intéressante sur le thème du vampire qui, plus que du sang, vole la jeunesse de ces petits prisonniers. 

    Film maudit pour avoir osé jouer avec le feu en mettant en scène des enfants dans une situation horrible, Lemora n’en est pas moins un authentique chef-d'œuvre. L’atmosphère sulfureuse et onirique qu’il dégage comme un parfum capiteux entraîne le spectateur dans un cauchemar éveillé. Richard Blackburn respecte le fantastique et son unique long-métrage rappelle les meilleures nouvelles des classiques littéraires du genre.




    1977 : Martin de George.A.Romero[2].

    (Selon Romero, la Nuit des Morts-Vivants est une adaptation officieuse de l’excellent roman de Richard Matheson : Je suis une Légende. Cette histoire subira l'outrage de plusieurs adaptations cinématographiques qui n'égaleront jamais la beauté vénéneuse de sa conclusion nihiliste. Le créateur des zombies cannibales était amené à croiser sur sa route le vampire pour lui refaire une santé.)

    Avec une réalisation proche du naturalisme, Romero dépeint son héros, Martin, comme un adolescent tourmenté se prenant pour un vampire après qu’un oncle vicelard, sorte de Van Helsing du pauvre, lui eût truffé l’esprit de superstition. Une antique malédiction poursuivrait sa famille transformant ses membres en vampire. Martin absorbera ce conte de fées morbide avec un peu trop de sérieux, ce qui l’obligera à se nourrir de sang. À moins que Martin ne soit effectivement un vampire muni d’une âme séculaire enfermée dans un corps encore imberbe ?

    Romero nous projette dans l’esprit de son antihéros dont les souvenirs de « vampires » remontent au 19e siècle. Ces fragments de mémoire sont-ils réels ou engendrés de la psyché déséquilibrée de Martin, sa solitude le rendant sujet aux fantasmes les plus débridés ? Romero nous donne une piste en contaminant les images de l’univers intérieur de Martin d’allusions aux productions de la Hammer. Alors que le réalisateur filme la plupart des scènes de façon naturaliste, les réminiscences du passé de Martin ont recours à l’utilisation de tout un panel d’effets issus des classiques du genre tels que des châteaux de carton-pâtes, des rideaux battus par le vent et des châtelaines vêtues de mousseline.

    Sans crocs, usant de sédatifs pour endormir ses victimes, Martin n’a rien d’un monstre terrifiant. Son comportement se rapproche de ceux des tueurs en série. Romero ne nous épargne rien de la difficulté qu’éprouve Martin à capturer ses proies. La mise en scène devient neutre, renforçant un malaise déjà pesant dès la première bobine. 

    Romero joue de l’impact des images avec intelligence. Lors de ces séquences, le spectateur se découvre installé à la place d’un voyeur assistant à un meurtre aussi effroyable que grotesque. La maladresse de Martin allonge de façon insupportable la durée des plans. Nous pensions naïvement visionner une énième itération du film de vampires, mais les scènes de violences glaciales nous désarçonnent. Romero nous plonge dans la réalité de Martin, dans son horrible solitude. Toutes ces techniques de narration préfigurent les films de serial-killer qui vont exploser lors de la décennie suivante et qui se claqueront sur le modèle de Romero. Cette méthode sera reprise le cas dans Maniac ou Henry, portrait of a Serial-Killer et Schizophrénia, entre autres films de tueurs en série. 

    Martin ne possède plus les spécificités d’un film de vampire. On y chercherait en vain les crocs, la transformation en chauves-souris, la cape et le lugubre donjon. Romero efface le folklore hérité de la Hammer use du vampirisme pour le pervertir. Martin appartient plus aux films de serial-killer. Mettant en scène à la première personne des désaxés homicides, ce genre cinématographique va peu à peu supplanter les films de créatures imaginaires tout en conservant quelques caractéristiques proches telles que l’omnipotence de son monstrueux protagoniste et la fascination qu’il entraîne sur ses victimes. Les thrillers américains useront avec abus de ces techniques narratives jusqu’à faire des tueurs en série des personnages omnipotents à l’intelligence démesurée et au charisme décuplé.

    Romero va garder son spectateur les pieds rivés au plancher des vaches. Martin, toujours pris en légère plongée, ne domine jamais ses victimes. Pire, le cadrage l’isole systématiquement de ses contemporains, accentuant sa solitude. Sa condition le condamne à une pitoyable lâcheté. Romero n’a conservé que l’habillage de film de vampire. Son œuvre ressemble à l'étude d’un cas de tueur en série atteint de vampirisme qui finira de manière bien malheureuse, mais logique sa trajectoire. 

    En signant ce film indépendant, Romero prouve qu’il n’est pas que l’auteur des morts-vivants, mais un grand cinéaste atypique dont les métrages les plus novateurs et iconoclastes sont parfois dissimulés par ses chers zombies.





    1979 : Le Vampire de ces Dames de Stan Dragoti.

    Désuet, le comte Dracula atterrit dans cette comédie poussive qui ne suscite qu’un bâillement poli. La littérature tord le mythe via la publication en 1976 d’Entretien avec un Vampire d’Anne Rice. Les vampires cinématographiques, eux, sont toujours compromis dans des navets. Symptomatique de ce déclin, le nanard comique de Dragoti plonge un Georges Hamilton en vampire hurluberlu dans la citadelle de New-York. Après cette oeuvre navrante les vampires ringardisés à outrance tendent à disparaître.





    Tobe Hooper tente de s’affranchir des lourdes contingences télévisuelles dans ce téléfilm, mais le roman apathique de Stephen King plombe le récit. Quelques nouveautés émergent puisqu'une des règles du vampirisme est mise à mal : l’efficacité de la croix dépend de la conviction religieuse de celui qui la brandit. Sans une foi religieuse digne d’un Torquemada des temps modernes, brandir une croix contre un vampire ne sert à rien.




    Pour dynamiser son intrigue, Tobe Hooper offre aux spectateurs un vampire répugnant. Le comte Barlow empreinte à Nosferatu un visage disgracieux à des antipodes de la fameuse « beauté » des vampires. Quelques effets visuels astucieux rendent les apparitions des morts-vivants inquiétantes mais le film demeure bancal. La démarche honore au moins les instigateurs de ce projet dans leurs volontés de proposer une fiction tentant d’intégrer le vampire au cœur du 20e siècle. On a pourtant des difficultés à reconnaître la patte de l’auteur de Massacre à la Tronçonneuse.





    Le réalisateur allemand Werner Herzog s’empare du classique du Murnau pour en tirer un remake à sa manière. Là où l’œuvre originale utilisait toutes les orgues de l’expressionnisme allemand, Herzog opte pour une approche naturaliste, respectant la volonté première de Murnau en allant chercher l'écho du vampire sur ses territoires d'origine.

    Le script suit à la virgule près la trame de son modèle, mais les décors, magnifiés par une photographie admirable, dégagent une ambiance irréelle que la musique hypnotique de Popol Vuh sublime, tissant une toile envoûtante pour favoriser l’irruption d’un fantastique cruel. Klaus Kinski plus spectrale que jamais dans le rôle de Nosferatu est aidé dans sa prestation par un maquillage reprenant les caractéristiques repoussantes du monstre de Murnau. L’acteur compose un vampire inédit, balançant entre les extrêmes de la cruauté et du pathétique. 

    Plus qu’à un stupide remake, on a affaire ici à une relecture d’une œuvre par le prisme d’un auteur jusque-là peu habitué aux envolées lyriques. La greffe fonctionne, mais le spectateur doit accepter le rythme languissant du cinéma de Werner Herzog.

    Malgré un visuel irréprochable, le film n’apporte pas d’innovation par rapport à la figure du vampire.
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    [1Respectivement : House of Dark Shadow (1970) et Night of Dark Shadow (1971) qui seront réalisé par Dan Curtis.


    [2Selon Romero, la Nuit des Morts-Vivants est une adaptation officieuse de l’excellent roman de Richard Matheson : Je suis une Légende. Cette histoire subira l'outrage de plusieurs adaptations cinématographiques qui n'égaleront jamais la beauté vénéneuse de sa conclusion nihiliste. Le créateur des zombies cannibales était amené à croiser sur sa route le vampire pour lui refaire une santé.