lundi 17 octobre 2016

    Bibliothèque des Ombres : Les Évangiles Écarlates/Clive Barker (in Psychovision)

    Retour des chroniques littéraires après une petite absence, avec un auteur dont j’ai pu autrefois admirer la maestria autant à travers ses recueils de nouvelles impeccables – Les Livres de Sang : un des rares ouvrages que je relis avec un entrain toujours renouvelé – qu’avec son univers des sombres merveilles urbaines qu’il a su déployer roman après roman. Un monde où le moindre coin de rue glauque pouvait être une porte d’entrée sur une dimension d’horreurs fantasmagoriques peuplées par des créatures ambiguës et amorales aux codes de conduites complexes. Hélas comme beaucoup d’autres, Clive Barker a vieilli et ce retour à sa saga emblématique qui devait être épique s’avère pour le moins décevant… 

    http://www.psychovision.net/livres/critiques/fiche/1345-evangiles-ecarlates-les
    Cliquer sur l'image pour avoir accès à la critique.


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    En bonus, la mémorable musique de Chrisopher Young pour le film éponyme...


    dimanche 9 octobre 2016

    Les Chroniques de Yelgor : La Nuit de l'Auberge Sanglante chap 10/25





    Illustration de Didizuka
     
    [Chapitre 1 : Le Chevalier]
    [Chapitre 7 : Tension !] 
    [Chapitre 8 : L'Auberge Sanglante]
    [Chapitre 9 : Le Sang de Sol]


    Des pans entiers de l’édifice s’affaissaient dans un vacarme cataclysmique. Allytah respirait avec difficulté et l’atroce blessure qui lui ouvrait le flanc gauche suppurait d’épaisses perles sanguines qui alourdissaient son pantalon de toile écrue d’une teinte sombre. Fauve à l’architecture indescriptible, Zed sauta sur sa proie, ses bras éclatant pour s’orner de pics osseux.

    Allytah esquiva deux coups s’achevant sur deux colonnes qui explosèrent en un nuage d’étincelles. La langue pointue, obscène ver annelé se terminant par un cruel éperon décoré de barbillons, jaillit pour frapper. Allytah interposa le sabre. Le tronçon de chair palpitante se perdit dans les flammes. Déséquilibré par la destruction de ses structures de soutènement, le plafond grinça avant de s’effondrer dans un soupir minéral. Allytah anticipa d’un battement de cœur l’affaissement du second étage et s’écarta d’un pas de danse sur le côté, hors de portée des débris embrasés. Surpris par la douleur qui émanait de sa langue tranchée, Zed réagit avec moins de promptitude. Les décombres écrasèrent l’ex-prévôt dans un sirocco de brasillons et de projectiles pourpres.

    Allytah avisa ses compagnons d’infortune, horrifiée par l’apparition du mage qu’elle venait de sectionner en deux. L’ignoble chose avait perdu ses jambes, mais les avait substituées par ses côtes métamorphosées en pattes d’araignée. Les entrailles, agitées d’une impossible vie indépendante, dégueulaient hors de la cavité abdominale béante pour enserrer Schiscrim dans leurs anneaux gluants.

    Toute la bâtisse gémissait, annonçant son collapsus imminent. Abandonnant Zed à son triste sort, Allytah bondit en direction de sa fille adoptive et de Bodre qui souffrait le martyre, cloué au sol par une mauvaise fracture. Grâce au sabre, elle annula un instant la pesanteur, effectuant un saut de plusieurs pieds. Elle s’apprêtait à se jeter à l’assaut du monstre qui tourmentait Schiscrim et à enfin sustenter le métal vivant lorsqu’un épouvantable craquement retentit derrière elle. La masse de chair palpitante à moitié carbonisée de Zed s’élevait du tas de braises. Ses tissus entamés par le brasier sifflaient sous l’action de la chaleur. De larges plaques de peau calcinée donnaient naissance à un bourgeonnement anarchique d’organes inconnus et à des membres surnuméraires atrophiés qui grossissaient à vue d’œil.

    Les pics de calcium de Zed s’interposèrent entre elle et ses protégés. Les yeux injectés de sang de l’ignominieuse créature se fixèrent sur Allytah. Elle frissonna en observant une bouche jaillir d’une cloque, encore empoissée d’un ignoble mucus blanchâtre.

    — Ça se passe entre nous deux, ma chérie !
    — Espèce de…

    Schiscrim se débattait dans la masse qui l’avait entravée. Elle ne possédait plus qu’une piètre marge de manœuvre et les anneaux gluants compressaient sa gorge, coupant lentement sa respiration. Désespérée, elle mordit les liens visqueux de toute la force de ses mâchoires juvéniles. Un sang pâteux au goût d’ammoniaque jaillit dans sa bouche, manquant de l’étouffer. Les tentacules s’agitèrent autour d’elle, relâchant leur étreinte sur ses jambes et ses bras.

    Elle griffa les parois de l’organisme impossible, lui infligeant de profondes entailles. Enfin, la créature la lâcha. Schiscrim bondit à quelques pieds du mage dont la silhouette ne cessait de vibrer et de se métamorphoser. D’une main tremblante, Bodre tendit son casse-crâne à la jeune Kobold. Schiscrim tint fermement le bâton.

    La tête à moitié décomposée par l’action de la chaleur lui adressa un ignoble sourire. Ses dents étaient devenues triangulaires et pointues comme celles d’un requin.

    — Tu veux te battre, hein petite salope !
    — Je ne te crains pas, abomination !

    La chose bondit dans sa direction, tous ses tentacules orientés vers elle. Schiscrim esquiva de justesse la charge d’une pirouette, faisant tournoyer son arme autour d’elle. Le poids au bout de la hampe conférait au bâton une force centrifuge qui permettait à Schiscrim de décupler la puissance de ses coups tout en maintenant une giration constante.

    Les tentacules de la créature étaient arrachés dès qu’ils tentaient de happer la Kobold. Le mage chassait les débris autour d’eux, élargissant le cercle de leur lutte dans le pandémonium de l’incendie. En arrière-fond, Schiscrim devinait le deuxième duel entre Alita et le prévôt. Son opposant sondait sa défense, perdant à chaque essai des livres de barbaque répugnante.

    Le monstre, comprenant qu’il risquait d’égarer des fragments de sa personne s’il persistait dans ses timides assauts, recula puis chargea en direction du mur. Aidé par ses pattes d’araignée, le mage escalada la pente avec une célérité surnaturelle comme un obscène arthropode géant. Des morceaux de maçonnerie se détachaient sous son poids. Il se suspendit, tête en bas, aux parties encore entières du plafond. Schiscrim bloqua le tournoiement de son casse-crâne avec quelques secondes de retard. Des filins poisseux s’enroulèrent autour de son cou et de ses bras, l’obligeant à lâcher son arme. La chose la hissa vers sa gueule béante de lamproie hérissée de crochets suintants de bave gluante, plantés en cercles concentriques le long d’un œsophage géant.

    Bodre avisa la situation de ses camarades, paniqués. Si seulement il pouvait avertir ce putain de Chevalier… Quel était son nom déjà, au jeunot ? Le vieux paysan se mordit la joue et agrippa le pied à peu près intact d’une table. À quelques pas de lui, une fenêtre qui n’avait pas encore été obturée par les éboulements bâillait sur les frimas de l’hiver. Il s’appuya sur sa canne improvisée, retenant un hurlement de souffrance lorsque sa carcasse décrépite craqua de tous les côtés et qu’un stylet de givre s’enfonça au creux de ses reins.

    Les quelques foulées qui le séparaient du monde du dehors, loin de la folie qui faisait rage dans les derniers murs debout de l’auberge, lui parurent des kilomètres. Des rats de glace rampaient le long de son échine, menaçant de le plier en deux de manière irréversible. La baffe d’une bourrasque de neige le rafraîchit, taisant la douleur le temps de quelques inspirations. Ses mains nues, contractées en une boule autour de son tuteur, blanchirent jusqu’à se confondre avec le tapis de poudreuse. À moitié aveuglé par les larmes qui se métamorphosaient en givre sous ses yeux, il avançait au jugé. Il espérait que cette dernière lutte qu’il menait contre la fatalité qui l’avait toujours frappé changerait la donne.

    Allytah et lui avaient entretenu – dès la construction de l’auberge à laquelle il avait participé – une longue et étrange complicité. Bodre ne se souvenait même plus de sa vie auparavant tant celle-ci était nimbée des vagues amères du regret. La guerre qui avait ensanglanté tout le pays lui avait pris son lopin de terre et sa famille. La famine puis la redoutable peste de fer avaient emporté tous les siens dans un flot d’horreur. Sa femme avait été une des dernières victimes à succomber, le corps piqueté de milliers d’épines surgissant des profondeurs de sa chair, déchirant ses lèvres et crevant ses yeux avec la lenteur sadique d’un inquisiteur de l’église de l’Unique. Le remède existait, bien sûr ! Les mages du roi Jehan avaient réussi à comprendre la nature de la maladie et à créer un antidote, mais encore fallait-il pouvoir entreprendre le voyage jusqu’à la capitale Tulking-Rox et s’acquitter du prix exorbitant de la précieuse substance.

    C’est dans ce cauchemar de tous les instants, dans un petit hameau saigné à blanc qu’étaient apparus la Noctule, son compagnon Jacques le forgeron et toute sa marmaille bariolée. Elle avait administré l’antidote aux villageois qui pouvaient être sauvés. Elle s’était installée dans les profondeurs des bois, à quelques lieues de leurs champs. Malgré les quelques protestations du bourgmestre et du prêtre de l’Unique, les locaux avaient souhaité remercier la Noctule – sans faire le rapport entre cette étrange femme et les héros qui avaient remporté la partie contre les Dieux Noirs – en participant à l’élaboration du bâtiment qui était devenu un point de rencontre pour eux, mais aussi pour d’autres ethnies.

    Bodre en avait fait sa seconde maison et rapidement, il avait possédé son couvert et son gîte quand il le souhaitait. Allytah ne lui posait jamais de questions, elle lui adressait un sourire et tout était entendu. Il tentait parfois de timides remboursements de son ardoise qu’elle refusait toujours gentiment, mais fermement. Lorsque les premiers clients non humains étaient apparus, Bodre avait manifesté comme les autres locaux un mouvement de recul. Puis, en un imperceptible dégradé des récriminations, la population hétéroclite de l’auberge avait tissé des liens.

    Perdu dans ses souvenirs, se tenant à son bâton, Bodre progressait, pas à pas vers la deuxième entrée du souterrain d’Allytah. La bougresse n’avait pas choisi tout à fait au hasard le duché de Mabs pour s’établir. Son expérience de mercenaire l’avait mise au fait des secrets dont regorgeait le royaume, notamment ces abris souterrains, vaste réseau de galeries maintenues en état par une magie inconnue au service des nobles d’une très ancienne civilisation dont l’existence se délitait dans les limbes des siècles. Le Chevalier et les quelques survivants de l’attaque insensée du prévôt Zed – les dieux maudissent cette ordure – devaient patienter dans ces boyaux.

    Bodre louvoya entre deux pins dont l’éminence se perdait dans les pointillés d’un tapis d’étoiles à peine voilées par la lueur des flammes qui feulaient dans son dos. Il traversa deux lieues à une vitesse d’escargot. Il se damna mille fois pour sa lenteur tandis que ses amies risquaient de se faire tailler en pièces par des monstres issus de l’imaginaire d’un camé à l’huile d’Avtaup. Enfin, il repéra les deux rochers de forme ronde représentant presque Jyzho, le dieu de la félicité et de la gourmandise.

    Il se pencha sur la pierre qui masquait la dalle de métal. Le blizzard engourdissait tous ses mouvements. Il n’arrivait même plus à lâcher son bâton, ses doigts désobéissant aux injonctions de son cerveau. Il souffla sur ses mains paralysées. Sa colonne vertébrale craqua une nouvelle fois et il chut sur la surface rêche du granit. Il se fendit la lèvre et perdit deux de ses dernières dents dans un éclaboussement de sang. La conscience de l’urgence de la situation et la douleur continue de sa fracture masquèrent celle du choc.

    Incapable de bouger ses doigts pour composer le code qui lui permettrait de s’introduire dans la place forte, Bodre urina sur ses mains, se servant de la chaleur organique qui filtrait à travers les mailles de ses chausses. Le liquide chaud délia brièvement ses articulations blanches. Il poussa de toutes ses forces l’éminence rocheuse. La douleur qui émanait de son dos mordit ses côtes, s’insinua dans tous ses os, le transformant en une boule à vif. Il gargouilla une expression de désespoir puis la masse vibra pour enfin rouler dans la légère déclivité du terrain. Bodre usa de chaque précieux instant pour se pencher sur un pupitre lumineux qui rayonnait dans toute la forêt. Tremblant de tous ses membres, il introduisit la suite d’idéogrammes dans la boîte magique dans l’ordre qu’Allytah lui avait enseigné, des années plus tôt.

    La dalle soupira et pivota sur elle-même. Bodre plongea dans l’ouverture sombre. La force lui manqua pour s’agripper aux barreaux de l’échelle. Il glissa et tomba une dizaine de pieds plus bas. La douleur explosa dans son dos, l’emportant dans les ténèbres.

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    Un peu de musique pour se mettre dans l'ambiance...




    mardi 27 septembre 2016

    Philosophie de Comptoir : La carotte poivrée dans l'oignon

    Ouverture d’une nouvelle rubrique de ce blog qui me permettra de me lâcher sur un sujet ou un autre. D’habitude, ma crémerie c’est la fiction, mais parfois il faut sortir de sa zone de confort. Je ne me prétends pas journaliste, sociologue ou quoi que ce soit en –ogue… mais certains événements, certaines personnes ont le don de déclencher des réactions épidermiques chez moi ! Cet espace navigant entre humour noir et recherche de sens est un domaine dans lequel je ne mâcherais pas mes mots. Il y aura moult apartés, grossièretés et pis encore… Amateurs de poneys roses et de sorcières mignonnes, passez votre chemin !



    1. L’Origine du mal.

    Un opportuniste – appelons-le Pandor – a signé avec un célèbre éditeur, que nous renommerons Panama Jack, un album jeunesse qui a envahi les bacs. Jusqu’ici rien que de très logique, mais les choses se gâtent quand on connaît les termes du contrat.

    Selon sa propre légende, Pandor aurait présenté l’embryon de cette BD à plusieurs éditeurs qui auraient refusé, faisant saigner son pauvre petit cœur. Ni une, ni deux le bonhomme passe à l’autopublication sur le Oueb 2.3.4.5 – comme beaucoup d’autres artistes, dont votre serviteur – et il rencontre un phénoménal succès outre-Atlantique. Au passage, celui-ci utilise des bénévoles pour corriger et traduire sa BD en plusieurs langues… La solidarité 2.00 m’arrache des larmes de crocodile ! Le bougre arrive à vivre du mécénat de ses lecteurs de manière confortable pour pouvoir pratiquer son activité à plein temps – petit détail à se mettre sous l’oreille pour la suite.

    Comme beaucoup d’autres personnes, Pandor use d’une licence créative, mais — à la différence de ce blog où j’interdis quiconque d’employer mes travaux à des fins commerciales — notre ami, lui, a laissé son ouvrage libre de droits. Tant qu'on le crédite, n’importe qui peut prendre ses images pour les vendre. Sans qu'il n'ait son mot à dire, ni qu'il n’y touche un kopek. Vous avez bien lu. Pandor explicite sa démarche en développant de l’argument de la pub – gratuite – qu’il reçoit de son œuvre. Pour lui, tous les prolongements annexes de son Webcomics ne sont que des produits dérivés. Ce qui en dit long sur l’esprit mercantile dans lequel est conçue cette « œuvre ».

    J’ignore — et à ce stade je m’en fous — si Pandor a fait appel à Panama Jack pour inonder le marché francophone ou si celui-ci, par l’odeur du succès alléché, l’a contacté. Toujours est-il que ni une, ni deux, l’harpagon des livres signe avec Pandor pour un album tiré à la hauteur d’une bagatelle de 10.000 exemplaires.

    Le chiffre donne une idée de l’indicible bêtise de la chose… Mais en plus Pandor, croyant dur comme fer à sa petite morale égotiste — typique de cette génération née avec une cuillère en argent dans la bouche — est rétribué de 350 $ par mois, considérant Panama Jack comme un mécène. Un choix qui a fait hurler les auteurs de BD professionnels qui bouffent déjà du foin à longueur de temps. De nombreuses personnes sont venues essayer de dialoguer, parmi elles du beau linge (Boulet, le scénariste Thierry Gloris et quelques autres…), mais Pandor campe sur ses positions dans une posture quasi autistique, balayant tous les arguments raisonnables avec un cocktail de chiffres et de moraline indigeste.

    Pour Pandor, Panama Jack ne lui offre que le service de « l'impression ».

    Comment t’expliquer, le demi-sel ?

    Ton accord c’est du caca en barre et ça fout tout le monde dans la panade. À part Panama Jack... qui doit en crever de rire à s’en faire exploser la panse ventrue.

    Ma tronche à l'annonce de cette arnaque...

    2. Du rôle de l’éditeur.

    Ça peut surprendre, mais un éditeur n’est pas un imprimeur. Voilà.

    Quelques minuscules recherchent sur le net — puisque tu aimes ça, Pandor — suffisent pour en avoir la preuve.

    Les premiers éditeurs étaient aussi des imprimeurs et des libraires puisque souvent le dépôt de vente était situé près des rotatives. Mais les deux professions sont distinctes. Au fur et à mesure des mutations du métier, le patron de l’imprimerie se mua en éditeur et les deux fonctions se sont scindées.

    Actuellement, l’éditeur fait un parie sur la viabilité de son poulain et il le diffuse pour que les potentiels lecteurs puissent avoir accès à son œuvre. Ce faisant, il apporte une plus-value au travail de l’auteur en l’aidant à revoir sa copie. Il est son premier public critique, celui qui lui donnera un recule nécessaire pour peaufiner son ouvrage.

    Ensuite, l’éditeur propose un service de révision pour éviter les fôtes d’aurtografes. Il fait le maquettage pour que le livre que vous retrouverez dans votre libraire soit agréable à vos petits yeux ébahis. Enfin, il assure la promotion du produit fini et le défend becs et ongles contre les diatribes de la presse. Éventuellement, il paye aussi la traduction pour la diffusion sur le marché étranger. Tout ceci n'est que théorique et valable dans un monde fait de miel, d'abeilles toutes douces et de merveilleuses licornes.

    Sur l’œuvre de Pandor quel aura été le travail de Panama Jack ?

    Il s’épargne d’entrée de jeu les risques puisqu’il sait déjà que l’œuvre possède un lectorat, prêt à passer à la caisse de surcroît. De plus, la logique de Pandor est tellement tordue qu’elle en devient flippante. Je cite un de ces commentaires :

    « Donc ce buzz, dit-il la vérité ? En partie, oui, c’est pour ça que ça marche. Il est possible à n’importe qui de faire des produits dérivés de […], de façon commerciale, en suivant un ensemble de règles de la Creative Commons Attribution permissive que j’ai établies. [Panama Jack] qui imprime à 10 000 exemplaires mon webcomic n’est qu’un produit dérivé à mes yeux (comme déjà dit). Pour faire un parallèle, je le considère comme si j’avais un film et qu’ils imprimaient la figurine du héros. Rien de plus. Nous avons eu une collaboration que je décris en anglais sur le blog de […] J’en suis satisfait, c’est super cool un premier album imprimé, mais cliquez sur le bouton « HD » sur le site de […], et vous y aurez plus de détails, plus de couleurs que dans l’album imprimé. Ma BD principale, mon support de choix n’est pas l’album de Glénat. Ce n’est pas le média principal de […]. D’autres projets suivront comme l’éditeur allemand […] qui vient de rejoindre le mécénat de […], le livre de la […] ou une édition régionale en breton de […]. Ce n’est que le début, le projet n’a que deux ans et je ne compte pas tout ça comme un manque à gagner. Je n’y vois que les effets positifs de personnes qui utilisent la base de ressources que j’ai créée, avec respect, dans les règles qui me conviennent pour créer plus de valeur autour de la série. Et ça fonctionne. »

    Par où commencer ? Pandor considère que le seul support viable de sa BD c’est le Web. Pourquoi pas, je n’ai rien à lui reprocher. Par contre, imprimer en 10.000 exemplaires une BD au rendu laxiste en pure connaissance de cause exprès me laisse songeur…

    Une BD c’est du papier — des arbres — de la couleur et de la colle. Ce sont des gens qui empaquètent, une distribution et des libraires en fin de chaînes qui doivent gérer des bacs déjà pleins à craquer…

    Enfin, et tout aussi important à mes yeux, un album relié c’est pérenne. C’est pour ça que moult scribouillards – ne prenez pas la mouche, je m'inclus dans le lot – tentent l’édition classique. Bien traité, un livre se conserve très longtemps ! [1] Ses pages ne se corrompent pas et même si votre électricité disparaît, vous pouvez toujours en profiter. Néanmoins le papier à un coût humain et écologique. Et donc, tous ces efforts et quelques arbres ont été mis au service d’une BD — mal imprimé —, qui sera considéré par son auteur comme un vulgaire flyer de MJC [2].

    Et j’ai très envie de demander à ceux qui encouragent ce mec :
    C’est ÇA l’avenir de la BD que vous défendez ?
    Vous vous foutez de ma gueule ?

    Mon ami le loup-garou est emballé à cette idée...

    Le nombre d’exemplaires de cette pantalonnade est atterrant pour une première publication. En général, le tirage pour un premier album d'un jeune dessinateur atteint un millier d'exemplaires — estimation à la louche en étant très, très optimiste — avec une couverture médiatique qui se résume souvent à peau de zob.

    Ajoutons au dossier déjà bien lourd que Panama Jack possède assez de puissance financière pour assurer lui-même la gestion du stock et la diffusion ce qui est logiquement le travail d’un autre intermédiaire dans l’écosystème du livre : le diffuseur. L’économie substantielle que fait Panama Jack sur les droits d'auteurs ET de diffuseur lui permet de rogner sur les droits d'auteurs et de baisser le prix de l'album. Dans un élan de générosité qui arracherait des larmes à Roger Corman il propose la BD à un très petit prix 9,99 €. Même si inférieur à la moyenne pour une BD [3], c’est très cher pour un flyer…

    Et des gens pourtant très intelligents défendent cette magouille !
    Vous pétez un câble, les gars !
    Vous n’avez pas honte ?

    Ah ! Et au fait, j’ai juste une question… Si ta BD est si géniale, Pandor, pourquoi est-ce qu'on a refusé ton projet ? Parce que jusqu’à preuve du contraire, les petits chats et les sorcières façon Miyazaki, ce n’est pas une thématique sujette à polémique, n’est-ce pas ?

    Tes interlocuteurs n’auraient-ils pas cerné, au-delà de la technique virtuose issue de l’animation, une certaine paresse intellectuelle, Pandor ? Tu vois, il y a des éditeurs qui sont des rats en affaire, mais d'autres possèdent assez d’éthique pour te dire non, et dans la foulée te pousser à réfléchir, te remettre en question avec un bon coup de pied au cul.

    Que tes petits Mickey fonctionnent sur le Web c’est une chose, que cela soit mérite un écrin de papier (à la ramasse) pour te faire une obscène pub géante en est une autre…


    Les vieux de la vieille ne lui disent pas merci...

    3. Les Auteurs de BD, ces doux rêveurs en voie de disparition…

    Réveillez-vous ! On vous le dit, l’avenir c’est le crowdfunding. L’éditeur ? Ce n’est qu’un imprimeur !

    Bon.

    De par mon parcours pluridisciplinaire, j’ai croisé moult personnes sur ma route dont des créatifs. Nombre de connaissances, lointaines ou proches tâtaient du crayon – souvent avec un talent insolent – et se posaient des questions pertinentes sur l'art. Nombre d’entre eux n’ont même pas eu ne serait-ce que l’ombre d’une chance qu’éclore comme ils le méritaient. Vous pouvez me rétorquer qu’ils n’avaient qu’à être meilleurs, à croire en eux, car quand on veut, on peut !

    Sauf que non.

    Mais avant de démêler cet imbroglio, retournons quelques décades en arrière, à une époque où le monde de la BD n’était pas bouché par des kikoolols adeptes des préceptes de Saint-Shônen (la volonté plus forte que tout… Mon cul sur la commode !)

    1/ Dans les débuts de la BD francophone, celle-ci paraît sous forme de magazine [4] et les auteurs sont payés à la planche. Plusieurs magazines de BD ont vécu jusqu’à la fin des années 80 qui est, grosso-merdo, le moment ou ça a commencé à déconner grave. Plusieurs de ses journaux ont mis la clé sous la porte tandis que les ventes chutaient. Bon, eux c’est la vieille garde, la crème. Des artistes au sens noble du terme qui en avaient dans le pantalon et qui ont bousculé les conventions d’un jeune média qui en avait besoin. On pourrait citer en vrac Goscinny, Greg, Franquin, Gotlib, mais aussi la bande de Metal Hurlant qui a contribué à la reconnaissance de la BD en tant qu’art à part entière grâce à des monstres graphiques comme Moebius, Druillet, Caza, F’murr… Ce système de paiement à la planche perdure en Italie, au Japon et aux États-Unis. Cette méthode est bancale, mais permet aux plus besogneux de croûter plus ou moins décemment.

    2/ C’est à la fin des années 80 — la datation n’est pas précise, mais cet article n’a pas la prétention de refaire l’histoire de la BD, juste d’expliciter un contexte — que la publication en journal, sauf cas rares, cesse. Les BD seront désormais imprimées sous forme d’album. Autrefois l’album demeurait la récompense pour les séries qui passaient le crash-test de la parution en magazine. L’avantage de l’album est que vous possédez le récit complet (encore que…) L’inconvénient pour les auteurs est que ceux-ci doivent faire un dossier éditorial qui comprendra des planches, des recherches, des découpages… Déjà un bel investissement d’énergie sans avoir la certitude d’être publié. Et quand bien même signent-ils pour un premier recueil, qu’il faut recommencer les démarches d’un projet à l’autre, en admettant que l’album se vende bien. Rappelons aussi pour approfondir le contexte que le ou les auteurs d’un album vivent d’une avance sur droit pendant la confection du bousin. Avance sur droit qu’ils doivent rembourser si l’ouvrage se plante en librairie. De quoi logiquement décourager n’importe qui de vouloir foutre ne serait-ce qu'un pied dans ce marigot.

    3/ Je ne parlerais pas des nombreuses traductions de comics et de mangas dont les mastodontes de l’édition nous inondent. D’après mes observations sur le terrain, le public du franco-belge et des BDs allochtones n’est pas le même et les lecteurs des uns glissent rarement d'un domaine à l'autre. Ensuite je n'entends pas mettre en concurrence des pays dont la sensibilité demeure différente dans l'approche du médium. En nous concentrant sur le Franco-belge, en parcourant les bacs d’une librairie, il est patent que la cadence de publication s’est accélérée jusqu’à atteindre un point limite qui a dévalué le travail fourni sur un album de BD. Combien de ses bouquins ne sont-ils là que pour permettre aux grosses boîtes d’édition de faire du remplissage linéaire ? Une BD de qualité au graphisme inventif et au scénario alerte se retrouvera noyée dans une masse informe de papier. Elle ne sera qu’un dégât collatéral pour mettre en avant un énième épisode d’un milliardaire en blue jeans.

    Avec cette surproduction — et le secteur de la BD n’est pas le seul impacté — comment les auteurs peuvent-ils vivre, puisqu’ils se partagent un public qui n'est pas en expansion. De plus, les écoles d'art forment toujours de petits nouveaux gonflés d’orgueil prés à être dépucelé avec violence par un marché saturé. Il n’est pas étonnant de voir des auteurs – parfois même de vieux briscards — jeter l’éponge.

     
    Attention, pulvérisation sociale en court !

    4. Une erreur d’interprétation.

    Dans un contexte économique dans lequel l’on instaure la loi El-Khomri, Pandor accepte un marché inique, créant un précédent qui ne jouera certainement pas en faveur des auteurs.

    D'un autre côté, les partisans du logiciel libre y voient une révolution, un signe que les choses bougent dans le bon sens. Certes, les licences libres permettent le partage d’information, elles possèdent leurs utilités et je ne renie pas le travail que certaines personnes exécutent pour déblayer le terrain. Je peux même comprendre jusqu’à un certain point leur manière de penser, mais elle ne fonctionne pas dans ce cas précis, car avec Panama Jack en scène, nous ne parlons plus d’un échange, mais de commerce.

    Et cela fausse toute la donne.

    Outre le fait que ceux qui aiment les histoires de Pandor devront passer à la caisse pour avoir l’ouvrage sous un format papier dans une qualité altérée, le côté commercial du projet implique un changement de paradigme. Pandor entraîne, qu’il le veuille ou non, tous les auteurs à sa suite. Croire que les éditeurs n’ont pas les yeux braqués sur ce phénomène relève au mieux de la naïveté, au pire du crime de félonie.

    Gangrené par la culture du gratuit, les futurs auteurs de BD ne devront-ils plus compter que sur l’hypothétique générosité — sujette aux caprices, aux modes et à l’air du temps — des internautes pour pouvoir en vivre ? Car Pandor ne jure que par des systèmes de financement en ligne. Dans certains commentaires qui entourent cette affaire, une statisticienne reprend les chiffres issus de ses sites, et ils font peur. Sur un nombre faramineux d’inscrits, seule une petite poignée arrive à faire leur beurre en marchant sur la gueule des voisins. Violence sociale, que ferait-on sans toi, ma douce ?

    Ces sites, surfant sur le Webeldorado façon Über — dont ils ne sont que la déclinaison pour les artistes — se sucrent au passage d’un pourcentage sur les donateurs. Ne leurs jetons pas l'opprobre, ce sont avant tout des entreprises, pas des organismes de charité. Les sommes captées et reversées par ce système court-circuitent les cotisations sociales et les autres dispositions de solidarité nationale [5]. Au final, nous obtenons un mécanisme encore plus exclusif que celui de l’édition normale assortie d’un individualisme inouï qui laissera pas mal de naïfs sur le carreau quand il faudra se payer les soins de santé. Ajoutons à cela que les auteurs qui dépendent de ce système sont livrés pieds et poings liés aux caprices de leurs publics qui peuvent se détourner d’eux à la moindre tocade.

    En France les études artistiques coûtent assez souvent un bras [6] et une large partie de la population ne peux pas y avoir accès même en se saignant aux quatre veines. Or cet enseignement n’est pas anecdotique, car le dessin, la mise en scène et le scénario s’apprennent comme n’importe quel autre domaine de connaissance. L’école n’est certes pas l'unique moyen d’acquérir ces techniques qui transforment un peintre du dimanche en un artisan accompli, on peut tout à fait se débrouiller en autodidacte, la montagne à gravir n'en est cependant que plus haute… Répétons-le, mais ce n’est pas parce que l’on prend un crayon en main que l’on peut se targuer d’être un artiste du jour au lendemain. Tout cela représente un coût en temps, en argent et en travail.

    Quand Pandor se donne, la gueule enfarinée, à Panama Jack avec pour seul filet de sauvetage un public qui peut l’abandonner aux premiers changements de mode, cela revient à se livrer pieds et poings liés à deux systèmes qui fonctionnent de la manière similaire. L’un possède encore la faible sécurité d’un « choix », d’une prise de risque de la part de l’éditeur tandis que le deuxième est administré par les caprices d’une foule consensuelle. Cela ne devrait pas rassurer Pandor…

    Parce que je ne suis pas certain que Panama Jack ou d’autres de son acabit attendaient de la part d’un auteur un tel renoncement à ses droits les plus basiques. Alors que toutes les actualités montrent que notre système économique cherche de plus en plus à se débarrasser de l'humain, voilà un idiot qui réalise les fantasmes des actionnaires avec un sourire étincelant.

    Je n’ai même pas envie d’épiloguer sur le fait que le bougre se félicite de s’être forgé grâce à sa force de volonté et tout le sempiternel tralala de cette caste de gens imbus d'eux-mêmes. Il retombera sur ses pattes, il a eu le temps et l'argent de se mener une porte de sortie, mais pas les autres, ceux qui rament déjà et ceux qui n’aspirent qu’à éclore.

    Non ! Les licences libres, extraites de leur contexte aux forceps comme cela a été fait ici ne sont pas une solution. Pire, elles peuvent provoquer un dangereux précédent qui va offrir une arme supplémentaire aux gros éditeurs pour accaparer des contrats à moindres frais.

    Que reste-t-il à négocier quand on retire même la paternité d’une œuvre à son auteur ?

    Désolé fils, mais d’autres ont réussi comme-ça, accepte de mettre ton paraphe sur tes petits dessins pour qu’on soit réglo et prend une carotte poivrée dans l'oignon ?


    La négociation du contrat d'auteur moderne...

    5. Des Licences Libres.

    Que l’on ne se méprenne pas, ce blog et sous licence libre non commerciale. Cela veut dire que je refuse que tout ce qui a été écrit ou montré ici soit vendu sur mon dos. Si contrat il y doit y avoir, je compte bien en retirer un fruit pécuniaire. Je ne méprise pas encore assez mon travail pour tendre le cul et me faire tondre. C’est parce que la mention « non-commerciale » existe que nous pouvons partager de nos talents respectifs sur la toile dans une relative quiétude, sans craindre de nous retrouver exploiter par des margoulins sans scrupules. Le système est bancal, mais au moins fournit-il une corde de sécurité.

    Les licences libres ne sont pas là pour permettre au premier éditeur fainéant de se baisser et de s’emparer de l’œuvre qui aura fait le buzz pour se sucrer dessus. Outre que l’on avait déjà connu le brouillon de cette méthode avec la vague des Blogs-girly de sinistres mémoires, voilà que l’on devrait tout céder aux grands seigneurs des livres et en être reconnaissant, car « ils ont le cœur sur la main ».

    Croire qu’internet fait office de solution miracle c’est se foutre le doigt dans l’œil jusqu’au coude. Il est loin le temps de l’exploration de ce continent virtuel. Les portes se sont peu à peu fermées et les plateformes collaboratives ont vu l’émergence de société mettant en place leur web artiste, produits aseptisés pour attirer le lambda inculte.

    Avec le système du crowdfunding, il est à craindre que la création ne s’homogénéise encore plus. Les goûts et les allégeances du public sont trop volatiles et consensuels pour que l’on puisse s’appuyer sur un pareil mécénat pour construire une œuvre cohérente qui ne radote pas les derniers succès populaires du moment. Pour preuve, le style de Pandor ne reprend que des motifs déjà vu qui renvoient au Miyazaki de Totoro sans rien paner à l’essence des films qu’il imite maladroitement. Avec cette façon de fonctionner, les œuvres ambitieuses seraient balayées dans les poubelles de l'histoire. Cette méthode fabriquerait à terme un darwinisme social encore plus agressif que celui du monde de l’entreprise au profit des plus habiles à flatter leur audience en débitant en boucle les mêmes thèmes insipides.

    Le système éditorial actuel est certes perclus de défauts, mais il ne faut pas pour autant oublier que de petits éditeurs effectuent un véritable travail, défendent des auteurs qui ne sont pas forcément en adéquation avec les goûts du public. Et l'on a besoin de personnes qui sont prêtes à se mouiller pour donner naissance à des livres qui remettent en cause nos présupposés, nous fassent réfléchir. Le divertissement peut être intelligent et la BD que vous achetez pour lire dans le métro peut aussi vous parler, derrière les images et les phylactères…

    Interroger son époque, choquer, faire sens et rechercher la beauté dans la fange, c’est l’essence même de l’art. Retirez ceci de l’équation et vous n’obtenez qu’un gâchis d’énergie, de talents et au final de papier.


    Toute cette histoire me donne envie de...
    6. En guise de Conclusion…


    Il y aurait encore une pléthore de choses à rajouter. Cette affaire n’est qu’une énième goutte d’eau dans un le vase fêlé du système éditorial qui a largué depuis des siècles les amarres avec la réalité.

    Que va-t-il advenir de la tonne de papier utilisé pour concrétiser son petit rêve de gamin capricieux et égotiste ? Tout cela aboutira-t-il lamentablement au pilon ? Pandor n’a-t-il vu dans ce marché inique que son intérêt à court terme ? Au reste, puisqu’il fonctionne sous licence libre, pourquoi ne pas avoir poussé le concept jusqu’au bout et se servir des outils disponibles pour réaliser son album en impression à la demande ?

    Sans être forcément contre le système des licences libres, je m’inquiète un tantinet des dérives qui pourraient entraîner un tel précédent. Comprenons bien que rien n’est gratuit dans la vie et que tout à un coût.

    Construire une œuvre d'art nécessite une formation, une connaissance minimale de l’histoire de l’art et de la grammaire du médium que l’on choisit pour s’exprimer.

    Personne ne peut accoucher d’une BD lisible sans s’y consacrer pleinement. Les licences libres offrent certes la possibilité de se tailler une maigre fenêtre pour montrer ses travaux, mais elles ne nourriront pas son homme. Le mécénat du crowdfunding peut-être intéressant, mais son usage reste à double tranchant.

    La solution choisit par Pandor demeure épouvantable parce qu’elle créé une brèche dans le droit d’auteur dont les puissants se serviront pour accentuer la lutte entre tous pour une potentielle et éphémère audience.

    Enfin Pandor, de part son discours incohérent, sa fatuité et ses rêves de gloire est devenu l’incarnation de la mentalité de l’époque : irresponsable. Quand quelqu’un vous présente un contrat sur lequel il est écrit en lettres de sang : Sodomie Pour Tous, la décence veut que l’on dise NON ! On peut toujours dire NON ! Pandor a réussi à faire annuler un projet éditorial antérieur, refuser lui était donc possible. Sous-entendre que l’on se sert du système capitaliste pour son propre profit, de quelques manières dont l’on envisage le profit, c’est lui faire une allégeance de fait.

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    [1] Oh ! Oui ! Très longtemps ! En travaillant dans les réserves de ma bibliothèque, j’ai mis la main sur les premiers livres de poche importés par les Américains en Europe après la Seconde Guerre mondiale et même des raretés de 1800 parfaitement lisibles… Le volatil support numérique n’a pas encore atteint cette persistance aux outrages du temps (changement de format de fichiers dû aux caprices des entreprises, corruption des mêmes fichiers, plantages de la machine...)

    [2] Je n'ai rien contre les MJC, c'était pour souligner le côté grotesque de la chose.

    [3] Encore que cela reste relatif si on regarde du côté des mangas.

    [4] Dans le cadre de cet article, j’omettrais les strips qui paraissaient dans certains quotidiens qui obéissent à d’autres règles.

    [5] Pardon, je traduis en langage MEDEF : les charges sociales…

    [6] En gros deux systèmes coexistent en France : d’un côté les écoles privées dont le diplôme n’est pas reconnu par l’état mais dont le minerval coûte un rein sur E-bay par an ; de l’autre les Beaux Arts qui n’ont d’yeux que pour une approche très « art contemporain » – sur lequel il y aurait beaucoup à dire – de l’art d’où le côté technique est volontairement évacué pour se concentrer sur le concept…