mardi 19 décembre 2023

    Les Aventures d'Ethel Arkady : Pornopolis : Éclair Fulgurant

    Dans ce chapitre, Ethel Arkady, tombant de Charybde en Scylla, atterrit tout droit dans les bras visqueux d’un vieil ennemi qui entend bien lui faire rendre gorge. Malgré sa situation préoccupante, elle a réussi à atteindre le cœur de Pornopolis, découvrant un décor chargé d’une histoire qui s’affiche dans sa statuaire symbolique. 

    Les différentes figures présentent dans cette pièce possèdent chacune une fonction précise qui se reflètent dans les ailes du bâtiment. Cet endroit possédant une atmosphère mystérieuse, MakuZoku et moi-même avons recherché des modèles s’éloignant un peu de l’influence hellénistique que je souhaitais pour le labyrinthe des désirs qu’est le bordel d’Himiko.

    C’est MakuZoku qui m’a aiguillé sur les étranges des ruines de Göbeckli Tepe, lesquelles paraissent sortir des rêves fiévreux d’un artiste opiomane. Exactement ce que je voulais pour ce lieu aussi inquiétant qu’énigmatique. L’intégrale de l’image étant interdite pour les personnes mineures, vous pourrez l’admirer sur le second site consacré aux illustrations plus « corsés ».

     


    dimanche 8 octobre 2023

    Les Aventures d'Ethel Arkady : Pornopolis : La Sorcière de l'Ouest

    Après un mois de septembre difficile à cause de problèmes médicaux, je reviens tout doucement à mes activités artistiques habituelles. Il me reste beaucoup de travail en retard dur la table, dont une courte BD autour d’Arkady, mais j’avancerais ceci avant la fin de l’année.

    Ce coup-ci, voici une nouvelle illustration de MakuZoku qui est devenu un abonné de ma coriace féline… qui offre cette fois un visage à une de ses antagonistes la plus pugnace : La Sorcière de l’Ouest. Bien qu’humaine, celle-ci réussira à capturer Arkady à en faire son esclave (ce que je raconterais dans : « Le Manoir aux Mille Miroirs », toujours en cours de rédaction.). Navigant dans les eaux saumâtres de la haute finance, ce qui lui confère des moyens matériels impressionnants auxquels s’ajoutent sa froide intelligence et son parfait sadisme saphique. Une combinaison redoutable qui mettra Arkady à rude épreuve. Le personnage qui apparaît sur cette image n’est autre que le « démon » familier de la Sorcière : « Donald » de son patronyme vernaculaire.

    Comme cette illustration s’inscrit dans le cadre de Pornopolis, je vous redirige vers le site idoine pour la version complète.


    dimanche 20 août 2023

    Les Chroniques de Yelgor : Capitaine Allytah !

    Dans le troisième tome des Chroniques de Yelgor, j’ai prévu d’explorer le passé de notre chère  Allytah dans la piraterie. Je n’ai pas encore eu l’occasion de mettre en scène des pirates. Ce sera désormais chose faite, d'autant plus que le cadre « fantaisistes » des Chroniques me soulage au niveau de la documentation. Je garde le thème, sans pour autant me perdre dans une recherche que je n’aurais guère le temps d’accomplir. 

    Comme les Chroniques sont illustrées, et que chaque volume comporte une carte blanche donnée aux artistes qui collaborent avec moi, c'est au tour de MakuZoku de créer une scène que j’intégrerais au récit. Et il s’est surpassé !

    La réalisation de cette illustration coïncide avec une période pendant laquelle je sombrai lentement, mais sûrement dans le trente-sixième dessous d’un début de dépression, agrémenté de quelques difficultés supplémentaires dans mon travail civil et ma vie de famille. C’est dans ces conditions pénibles que je reçois le magnifique portrait d’Allytah par MakuZoku. Et je ne sais pas comment expliquer cela, mais ce dessin m’a aidé à passer le cap de ce moment délicat. Voir quelque-chose sur lequel on planche depuis quelques années, prendre corps, ça améliore le moral, mais il n’y a pas que ça : l’expression du personnage, son air à la fois haineux et désespéré, amplifié par la sensibilité du crayon parle à mon esprit fracassé, me raconte une histoire. C’est comme si Allytah elle-même me susurrait de ne pas la suivre dans son enfer que je n’y survivrai pas !

    J’ignore le pourquoi du comment, c’est la magie de l’Art. Cela marche sur moi, et je dois une fière chandelle à MakuZoku. J'ai toujours considéré l’art comme une forme de communication qui possède son propre pouvoir, et cette expérience consolide cette intuition… [1]. En certaines occasions particulières, il soigne les âmes éreintées et si ce n’est pas sa fonction première, cela n’en demeure pas moins une de ses plus hautes qualités, mais encore faut-il pour cela que les œuvres soient inspirantes...


     


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    [1] – Un peu hors sujet, mais je parle bien ici de l’IA « artistique ». Beaucoup d’encre a coulé à ce sujet, et je n’ajouterais pas grand-chose, à part peut-être cette pensée : je considère que toutes les formes d’art contiennent, en leurs seins, une forme de magie dans le sens ou chacune aborde une dimension différente de l’expérience humaine ; en ce sens, l’IA appliquée au secteur artistique – en plus d’être du vol pur et simple de propriété intellectuelle – pose un problème philosophique assez grave : comment une série d’algorithmes peut-elle dire quoi que ce soit sur l’existence humaine ?

    lundi 10 juillet 2023

    Les Aventures d'Ethel Arkady : Les Céruléens

     Après plus de six mois passés sur la couverture (garantie sans IA !) dont la colorisation m'aura explosé les orbites, quelques semaines d'ultimes révisions, j’ai enfin achevé les Céruléens. Cette histoire intervient juste après l'affaire du Vitallium, que j'ai aussi révisé dans la foulée.

    Malgré le fait qu’il s’agisse d’une aventure plus courte d’Ethel Arkady, le roman m’aura demandé plus d’efforts que je ne pensais lui en allouer. Au départ, cela devait être une récréation entre deux interminables sagas (Adélaïde & Pornopolis, toujours en court), mais j’ai bien cogité sur le sujet, risquant parfois ma santé mentale.

    À ce propos, je signale aux éventuels curieux qu’il vaut mieux être un lecteur mature pour aborder le roman. Et j’insiste à tel point sur le terme, que je demande à passer directement par ma pomme pour se le procurer.


     
     Extrait : 
    « Les têtes anonymes des étudiants qui l’observaient, installés derrière leurs pupitres se délectaient par anticipation d'assister à la mise au pilori de la retardataire. D’autres se ratatinaient, se racornissaient sur leurs fauteuils pour ne pas être choisis par la maîtresse. »

    dimanche 2 juillet 2023

    Dessin du Dimanche : Personnages de Gidéaire !

    Après trois mois sans poste, ce blog sent la poussière ! J’ai eu pas mal de soucis personnels qui m’ont tenu un peu éloigné de celui-ci, bien que je continue d’écrire sur le côté. Du coup, histoire de m’aérer l'esprit, j’ai repris quelques parties de jeu de rôle, profitant de celle-ci pour me remettre au dessin.

    Voici quelques personnages réalisés en suivant plus ou moins les instructions des joueurs, mais en les adaptant à la sauce. Pour la technique, je pose un léger encrage au feutre, puis je finalise aux crayons de couleur. Je propose un portrait en pied par session, et donc le défi que je relève ici consiste à élaborer une image avec toutes les spécificités que l'on m'aura indiquées.

    Je n’étais pas vraiment un grand amateur des crayons de couleur, mais les derniers que j’ai achetés (sur un coup de tête) possèdent un côté « gras », ce qui me permet de superposer plusieurs couches. J'avoue que pour le moment, mes compagnons de jeu sont enthousiasmés de ces essais brossés entre deux batailles. Et le dessiner me manquait, ne trouvant guère l'occasion de me concentrer dessus à la maison.


     
    Un changement de technique pour Harfang des Neiges, un personnage pour une autre campagne que j’ai achevée cette année et qui en aura bavé sous la houlette d’un MJ sadique, mais dont j’ai aimé suivre les pérégrinations. Ici, j’ai ajouté quelques corrections numériques, puis j’ai traité le tout pour en faire une sorte « d’imitation de gravure », parce que cela m’amusait.


     

     

    samedi 8 avril 2023

    Les Chroniques de Yelgor : La Bande Annonce !

    Une nouvelle publication Yelgorienne : 

    Après plus de six mois, la bande-annonce pour le premier roman et l’amorce du second est enfin terminée. La vie moderne étant constituée d’impondérable, il s’est parfois écoulé de longs laps de temps entre la réalisation de chaque plan, mais cette maturation à bénéficié au rendu final, même si la compression du Tube ne lui rend pas hommage. La vidéo possède une meilleure qualité sur la page Fesse-de-Bouc des Chroniques



    Les différents illustrateurs ont conférés une patine inédite à ce monde qui demeure distinct de la saga Arkady. Que ce soit MakuZoku, Didizuka ou Duarb Du, je les remercie pour leur contribution à ce récit tentaculaire.

    Le choix de la musique, étape cruciale pour la réalisation d’un court-métrage, fût-il aussi modeste que celui-ci, n’a pas été sans douleur. Un temps, je me suis perdu dans le labyrinthe des compositions libres de droits. Entre les sous Hans Zimmer et autre aberrations auditives, je pensais cette traque vaine, jusqu’à ce que les arpèges cosmiques du groupe Etrange envahissent mes esgourdes.
     

    Pratiquant un métal instrumental, c’est-à-dire sans chansons, celui-ci s’est avéré idéal pour mes sessions d’écriture matinale, leurs sarabandes parfois endiablées, parfois mystérieuses conférant un tempo à mes mots. Elles accompagneront sûrement les aventures d’Allytah tout au long de la rédaction du second tome. Aussi, après avoir acquis le second album, dont les différentes pistes réussissent à supplanter celles du premier en termes de complexité sonore, je leur ai demandé si je pouvais utiliser une section de leur musique et ils ont eu l’extrême amabilité d’accepter, mettant un terme à une harassante et agaçante quête.

    J’avais songé au morceau Titan du premier album, tout en impressionnante rythmes martiaux accompagné par des bruits de pistons, mais celui-ci se déploie sur la longueur en un air toujours changeante. Astralis, avec son ouverture pleine de puissants rifts énergiques supportés par une batterie prise de spasmes, fonctionnait mieux pour le montage, d’autant plus que la mélodie connaît des silences abrupts, des virages sonores acrobatiques qui voisinent d’autres ponctuations dans lesquelles prélever un échantillon s'avérait plus commode. 
     
     

    Je remercie Etrange pour leurs amabilités. J’espère que le résultat final rend justice à leurs compositions. Je vous recommande chaudement la fréquentation de ce groupe dont les deux albums proposent une périple cosmique dans un univers à mille lieues du nôtre.

    dimanche 26 mars 2023

    Cinoche P comme Pourris : Avatar 2 : la voie de l'eau de James Cameron (2023)

    Après un moment à bosser d’arrache-pied sur Ethel Arkady ou les Chroniques de Yelgor, il est temps d’exécuter un minuscule pas de côté pour rédiger de nouvelles critiques de films, mais dans un format un peu moins formel, plus libre et plus rapide que celles que j’ai déjà produites. Depuis la fin du confinement, j’ai retrouvé le chemin des salles obscures, et je pense qu’il est utile de jeter un regard dans le rétroviseur sur ce que j’y ai vu.


    À tout seigneur, tout honneur, jugeons sur pièce la dernière cathédrale cinématographique du Grand Jim, la ©Révolution Copernicienne qui nous apprendra comment l’on réalise des films à l’aune des années 2020, alors même que les IA sont en passe de remplacer les artistes[1]. D’une durée astronomique Avatar 2 propose un spectacle total, en 3D 400 THX 6.2 de mon cul, avec une myriade de détails et de biens belles vignettes, ma bonne dame, qu’elles sont magnifiquement poétiques ! Pouet, pouet !

    Alors, non ! Juste non ! Ce film est une insulte à l’intelligence humaine. Si je ne cracherais pas sur la réalisation qui vaut mieux que le moindre plan pondu par un « yes-man ! » de chez Disney, je ne m’extasierais pas non plus sur celle-ci. Elle ne comporte que peu de plans signifiants, se contentant d’illustrer de manière besogneuse le scénario. C’est le strict minimum syndical ce qu’on attend d’un réalisateur comme Cameron. Pour le reste, les thèmes exploités dans le récit ne dépareilleraient pas dans un western du Duke, avec cette bonne vieille moraline ricaine assénée au marteau-piqueur avec la légèreté d’un quinze tonnes bourré à la Kronenbourg. Hésitant comme un étudiant encore hébété par sa soirée de picole entre différentes voix narratives – sans en retenir aucune – le film ne répondra à AUCUNE des questions qu’ils posent lui-même, vous rotant des TGCM à la gueule en guise d'explication.

    Les beaux esprits qui s’accrochent à cette ©Révolution avec l’énergie du désespoir tente de transformer cette informe masse de plastique en un chef-d’œuvre ne contemple au fond que la déshérence morbide de leur idole passée. À l’évidence, et depuis une bonne vingtaine d’années, le cinéma de Cameron est rentré dans un coma avancé. Le premier Avatar recyclait déjà des pans entiers de sa filmographie dans un vomi de couleur fluo usant de ces Schtroumpfs comme de jouet dans des décors puant le silicone à plein nez. Ce nouvel opus entérine cette chute.

    Ce n’est pas parce que le film possède une structure en « chiasme » que ça le transforme en parangon d'intelligence. Maîtriser ce genre d’outil narratif, c’est la base pour n’importe quel aspirant écrivain. Ça n’excuse en aucun cas tous les trous dans la trame scénaristique sur lesquels je ne m'étendrai pas[2], ça serait trop fastidieux. Je signalerai juste que le film appartient au genre de la science-fiction, et que cela demande donc une rigueur de tous les instants dans l'exploitation de la logique interne du récit. Qu’en 13 ans (bordel !) personne dans la production n’ait rappelé au ©Grand Jim que les spectateurs ont besoin de règles claires, précises et que l’on réponde aux enjeux que l'introduction lance reste une éclatante preuve de paresse intellectuelle.

    Dans cet étron, tout est à chier : la musique vous scie les nerfs avec ses 250 000 cordes aussi asthmatiques, singeant les compositions de James Horner, lequel avait déjà pas mal recyclé ses plus glorieuses mélodies sur le premier épisode de cette saga, devinant peut-être que le réalisateur se muait en une caricature de lui-même ; Sam Worthington, à son habitude, livre une « performance » brillante de gnou sous prozac, tout à fait reconnaissable malgré son grimage bleu : Le vide abyssal de son regard vous hantera toute la nuit, on touche l’infini en se perdant dans cette négation de l’intelligence ; les autres acteurs déclament les pires inepties dans un surjeu constant, couverts des plus beaux effets spéciaux du monde, enfin pas un de ses personnages ne mange, ne saigne, trahissant là leur véritable nature « d’avatar » en plastoc, détaché de la contingence biologique qui est le lot du vivant. Cette artificialité eût pu être une mise en abîme terrifiante, mais cela restera un éclair de lucidité de la part du ©Grand Jim dans cette océan de vacuité.

    C’est que, film grand public oblige, et avec toutes les sensibilités exacerbées de notre époque, il ne faut froisser personne. Effaçons donc ces manifestations organiques qui sont pourtant à la base de notre vie en communauté[3]. J’aimerais aussi profiter de cet inventaire pour gloser sur le flagrant délit d’anthropomorphisme éhonté qui implique les baleines à mâchoire trifide. Ce moment de cinéma en or massif a pulvérisé le seuil de mon incrédulité à Mach 6 dans un élan de ridicule auquel même les dessins animés les plus niés de l’Oncle Walt n’ont rien à envier.

    Quant à « l’inventivité » du monde de Pandora, si foutre six pattes à des chevaux et coller une collerette à des plésiosaures est un parangon de création, je pense que la plupart des écrivains de fantasy se retournent dans leurs tombes. Il n’appartient qu’à vous d’ouvrir un livre d’Ernst Haeckel pour découvrir la pauvreté cagneuse de cet univers en carton-pâte numérique. En vérité, ce truc – j’hésite à appeler ça un film – ressemble beaucoup aux productions Marvel. Alors, comme je l'ai dit plus haut, certes pas au niveau de la réalisation, mais dans son vide thématique abyssal, son manichéisme abject, ses péripéties toutes plus téléphonées les unes que les autres, l’idiotie crispante de ses personnages, l’on retrouve la même absence d’ambition, la même atonalité un poil méprisante pour son public.

    Et pour cause, c’est que ce « truc » ©Révolutionnaire coûte le PIB d’un pays en voie de développement. Il faut se rembourser ma petite dame ! Que les actionnaires en aient pour leurs thunes. C’est d’autant plus amusant, de manière métatextuelle, que le film se vautre comme un cochon dans un écologisme d’apparat, alors que dans sa fabrication, il se situe aux antipodes de ce qu’il prêche avec une suffisance qui confine à l’insulte caractérisée. Et c’est peut-être cette hypocrisie crasse qui m’a le plus ulcéré. Cette façon sordide de se draper dans sa morale, sûre de son bon droit, qui n’appartient qu’au bourgeois, transpire par toutes les puces électroniques de cette sinistre et trop longue merde.
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    [1] – plus malléables, n’ouvrant pas leurs gueules, qui s’en plaindra ? Sûrement pas les spectateurs habitués aux scripts pourris de chez Marvel.

    [2] – pour la bonne bouche, je citerai tout de même ces séquences ahurissantes ou les antagonistes ont TOUTES les cartes en main, les personnages dans leurs viseurs, mais laissent passer l’occasion parce que ça convient au réalisateur ! Du ©Génie !

    [3] – La plus simple des méthodes pour tisser des liens entre êtres humains consiste souvent à se réunir autour de gueuletons. Un élément que le film occulte, puisque pas un de ces personnages n’est incarné.

    dimanche 26 février 2023

    Les Aventures d'Ethel Arkady : Les Céruléens - couverture 02 (avec Syzygy)

    Après une interminable gestation, j’en ai enfin fini avec la couverture des Céruléens, dont l’artiste Syzygy a réalisé le crayonné. J’avoue que je ne suis pas mécontent de cette illustration qui possède une ambiance bizarre due à son aspect allégorique. Je poste ici le récit avec et sans les titrages pour vous en donner une petite idée. Le roman me demandera encore un peu de travail avant d’être mis en vente, mais la fin se rapproche à grands pas.  

     

    Voici un court extrait du premier chapitre de cette nouvelle histoire :
     
    « À la terrasse d’un restaurant familial aux allures de chalet, Ethel Arkady dégustait une épaisse pièce de viande barbotant dans son hémoglobine. Elle admirait les nuages qui s'émiettaient en lamelles duveteuses contre les cimes sculptées en éperons tranchants. Le vent lui apportait un air hyalin qui dissipait les émanations de la ville, éveillant au creux de son ventre des élans de prédateur. La forêt de pins s'offrait à elle en un grand cirque et les ombres de la canopée lui susurraient à l'oreille la promesse de sanglantes courses. En plein songe de prochaines chasses haletantes, elle piqua une nouvelle bouchée. 

    Les lieux majestueux lui rappelaient ses innombrables pérégrinations entre le Wyoming et le Dakota, en d’autres temps. Par ricochet, cela éveillait en elle le souvenir de Josh Derringer. Elle était aveugle à l’époque de leur rencontre et seules ses mains avaient gravées les traits de son amant au bout de ses doigts. Hélas, ceux-ci s’évaporaient, avalés par le lent écoulement des décennies. 

    Elle s'était mise au vert dans la cabane de Rattle Snake, après les événements qui l’avaient conduite à fuir Los Angeles, pour se concentrer sur ce qu'elle souhaitait accomplir, maintenant qu'elle avait mené sa quête vengeresse à son terme. D’autres questionnements, plus angoissants, pointaient sous la surface de ses pensées. Cette présence qui la squattait, toujours à quelques encablures de sa conscience, un spectre mordoré qui ne se manifestait qu’à l’extrême limite de son champ de vision. Elle espérait capturer cette « entité » qui l’habitait et la dompter ! Peut-être que cette créature, quoi qu’elle soit, posséderait des réponses au sujet des régulières pertes de mémoire qui trouaient ses souvenirs ?

    Elle dilapidait son temps en balades interminables sur les cimes voisines, profitant d’un soleil clément pour s’offrir de longues siestes avant de redescendre à la nuit tombée. Parfois, elle accompagnait Rattle-Snake dans des parties de chasse intenses, lorsque la pleine lune agitait de manière trop insistante le loup en lui. Elle se dévêtait pour traquer avec lui un cerf-mulet, un wapiti ou un simple couple de lièvres à raquette. Les proies de bonne taille étaient l’occasion d’orgies sanglantes au cours desquelles les deux prédateurs glissaient dans un délire lubrique. L'âme sœur de Rattle, la hackeuse Erzé, ne se formalisait pas de ces étreintes, car il lui arrivait de s’acoquiner à la féline en de lascives caresses quand son compagnon partait pour ses travaux nocturnes. Ainsi, son séjour s’éternisait en un songe agréable, à l’abri de la civilisation humaine. Arkady apaisait son tourment entourée par des individus avec qui elle partageait une saine amoralité païenne.

    Picorant son assiette, elle attendait une vieille connaissance qui, quoique de sinistres mémoires, avait réussi l’exploit de la dénicher dans cette enclave. Arkady se demandait si elle ne devait pas féliciter sa mystérieuse correspondante avant de l'occire pour de bon. Elle avait presque achevé sa pièce de chair gargantuesque lorsqu’une ombre se pencha sur elle, la coupant dans sa contemplation des montagnes millénaires.

    Vêtue d’une veste d’aviateur en cuir et d’une casquette à l’effigie des Rockies du Colorado, la nouvelle venue avait troqué son ancienne canne-épée contre un automatique d'un calibre imposant, comme en attestait la bosse provoquée par le holster d’épaule. Seul indice de son allégeance au Dieu des humains, une minuscule croix d’argent reposait sur les globes de ses seins proéminents sertis dans une chemise blanche. Ses cheveux couleur de blé coulaient en une masse ondulante autour d'elle. Une mèche couverte de poussière, témoin de la sénescence qui la taraudait, en voisinait une seconde à sa gauche qui portait de discrets reflets céruléens. Elle dissimulait son regard de tueuse aguerrie derrière d’épaisses lunettes à verres miroirs qui dévoraient son visage avenant.

    Elle s’assit en face d’Arkady. Ses lèvres pâles, ornées de rides, esquissèrent un sourire de connivence. Les carreaux des lorgnons reproduisirent en dédoublés le mufle de la féline qui se léchait les babines de sa langue rêche, recueillant les ultimes gouttes de sang de son festin. La femme glissa son jean usé dans le fauteuil de bois grinçant, puis posa ses rangers militaires râpées jusqu'à la corde sur la table en signe de provocation. Elle croisa devant elle des mains ornées de mitaines de cuir clouté.

    — Ça va comme tu veux, Ark’ ?

    Arkady leva vers elle l’émeraude sertie dans son orbite droite. La gauche, dissimulée sous un chiffon crasseux, abritait une Pierre de Dragon, terrible artefact de pouvoir que la féline répugnait à utiliser. Elle lorgna un instant l’étrangère. »

    samedi 18 février 2023

    Les Chroniques de Yelgor : chant deuxième : La Nuit du Fer-Vivant : La Mer d'Herbe

    Cette deuxième illustration de MakuZoku pour les Chroniques de Yelgor nous offre une Allytah dans sa prime jeunesse, avant que le temps et ses duels successifs ne l’abîment. Je suis satisfait de ce panorama présentant une partie de ce monde très particulier. Ce second tome sort de l’Auberge de la Noctule pour explorer plus en profondeur l’univers étrange de Yelgor, dans lequel insectes géants et proto-dinosaures s’ébattent joyeusement. Cette ouverture me donne l’occasion d’inventer toute une flore et une faune en me référant à ce que j’aime : la préhistoire et l’entomologie.

    Je vous propose aussi l’extrait mis en image, bien qu’à l’inverse de la première aventure que j’ai livrée dans ces pages, celui-ci soit tronqué. En effet, je m’attarde bien plus sur les différents éléments qui composent cet univers. De cette complexité foisonnante résultent des chapitres bien plus longs qui passeront mal sur le Oueb. Je pense à vos mirettes, chers lecteurs !

    Ce qui fait que la suite des aventures d’Allytah et de ses compagnons ne sera disponible que sur papier et en mode liseuse. Néanmoins, il me reste encore beaucoup de chemin avant que le récit n’aboutisse. D’ici là, et à moins qu’une bombe thermonucléaire ne mette un terme à nos existences, je continuerai de vous présenter un aperçu de l’avancée des travaux.

    [...]

    Nous cheminâmes longtemps dans l’interminable plaine qui n’était ponctuée que de quelques courtes dénivelées herbeuses. Ce morne paysage m’engourdissait les nerfs. J’étais habituée à la diversité des montagnes volantes couronnées de pics acérés et aux parois aiguisées par les vents de mon pays. Wärwülf nous guidait dans des sentes à peine esquissées qui trouaient la vastitude saturnienne. Nous nous reposions près de sources cristallines jaillissant à proximité des rares coteaux qui imprimaient des vaguelettes dans cette platitude. Ces rus étaient entourés de haies et de talus composés d’arbres malingres, d’imposantes fougères et de quelques sigillarias. À notre soulagement, nous ne croisâmes plus de cicandelles, ni d’autres prédateurs des plaines. Je redoutais les tyranides laineux qui chassaient en meute. D’après notre Hyksos, ceux-ci entraient dans la période des amours, et pour le moment, ils ne se sustentaient pas. Ces dispositions ne tarderaient pas à changer dans quelques lunaisons. Aussi nous accélérâmes le pas, tout à nos ruminations funestes.

    Jehan avait mal pris nos explications et hypothèses, ne voyant dans cette conjonction de vies brisées que la main du destin aveugle. Une idée à laquelle j’eusse souscrit, si je n’avais eu la connaissance fâcheuse de certains événements. Ces réflexions me ramenaient aux cuves qui me hantaient encore. Les rares éodes de sommeil que je grappillai me plongeaient dans des transes mémorielles dont je m’éveillai en hurlant. Ces cauchemars abominables écharpaient mon âme – si une telle chose existât – et mon corps, prisonnière de ces effroyables tubes de souffrance. Catsmyr m’aidait à repousser ces visions d’agonies, mais au plus nous avancions, au plus mes terreurs nocturnes gagnaient en puissance. Le manque de repos me minait, émoussait mes réflexes et mes forces. Catsmyr m’épargna une mort stupide quand je versai dans une des fondrières traîtresses qui constellaient la plaine. Ces trous boueux, dissimulés par les herbes hautes, étaient capables d’aspirer dans leurs profondeurs une monture et son cavalier en quelques respirations.

    Après plusieurs jours de ce voyage monotone, Wärwülf revint de son inspection très circonspect, car la piste de nos ennemis s’effilochait, comme s’ils n’avaient jamais existé. Nous pressentions un mystère, mais nous demeurions incapables de le résoudre. Nous tournâmes en rond pour rassembler de nouveaux indices, mais les dernières empreintes de leurs présences se dissipaient vite, à mesure que la végétation couchée par les chariots et les tricks se régénérait. Nous en conclûmes que nous nous retrouvions livrés à nous-mêmes. Néanmoins, la brève vision de Skadi dans l’orbe émeraude du sigil nous confirmait qu’ils se dirigeaient vers la Tour, qui demeura notre principal objectif. Ce mystère nous taraudait et nous nous murâmes un moment dans une humeur bilieuse. Seul Catsmyr se révéla d’une fréquentation plus avenante que mes compagnons et nous partagions, avant de nous endormir, les suppositions les plus folles.

    En accostant la cime d’une colline plus élevée que la moyenne, nous eûmes une vue zénithale sur le panorama. En dehors de ces ponctuations arboricoles, je ne distinguai rien dans cette étendue uniforme que les vents ballottaient de droite et de gauche, mais notre Hyksos reconnaissait la moindre variation de teinte des graminées et ils les nommaient dans une vingtaine d’appellations gutturales. Alors qu’il nous donnait une leçon, la cime des plumaces trembla en cadences, puis celles des rares popsus et lishophore malingres, comme si des mains invisibles en agitaient les troncs. Nous ressentîmes bientôt des trépidations sous les pattes de nos montures qui devinrent nerveuses. Catsmyr manqua de verser à terre, son squalcrâne piaffant de panique. Il se dressait presque à l’horizontale, ses pattes antérieures griffant le vent, pour désarçonner son cavalier. Je descendis de la mienne, accompagnée par Jehan, et nous tînmes sa longe. Je le caressai en émettant des sons de gorges rauques qui rassérénèrent le squalcrâne paniqué. Pendant tout cet épisode, mon bras gauche se lançait parfois à l’assaut de la poignée de mon sabre, comme mû par une volonté propre.

    Une odeur de végétation pourrissante nous enveloppa. Les tremblements s’accentuèrent et enfin des têtes oblongues émergèrent de l’océan vert. Elles se juchaient sur d’imposants corps grisâtres à la peau parcheminée. Ces créatures mugirent en chœur, puis les interminables gorges se penchèrent vers nous, arrachant avec des dents aciculaires les feuilles des arbustes en une seule bouchée. Leurs immenses yeux glissèrent sur nous sans nous voir. Leurs jambes colossales constellaient la plaine de cratères météoritiques. Elles soufflaient par des évents situés sur une proéminence de graisse, au sommet de leurs crânes. Ces animaux plus anciens que le monde dégageaient un sentiment de puissance inouï. Leurs queues fouettaient l’air en permanence, chassant les parasites ailés qui les harcelaient avec insistance. Le plus grand de ces nobles herbivores mugit, la forme serpentiforme de son coup se découpant dans le soleil couchant. Sa longue note, grave, nous étreignit de sa mélancolie sans âge. Ses semblables l’accompagnèrent, formant un concert d’étranges cornes de brume. Quelques jeunes passèrent près de nous, leurs membres encore malhabiles tremblotant sous le poids de leurs abdomens gargantuesques. Ils grognèrent en croisant les squalcrânes qui caquetèrent une réponse incompréhensible. Il s’écoula un siècle avant que le troupeau de djoros ne s’estompât dans la plaine, l’écho de leurs cris se dissipant dans le vent.

    [...]

    dimanche 29 janvier 2023

    Les Chroniques de Yelgor : chant deuxième : La Nuit du Fer-Vivant : La Tempête Verglaçante

    Une illustration réalisée par MakuZoku qui va devenir un habitué de mes différents univers. Je lui ai laissé une « semis » carte blanche, dans le sens où beaucoup de personnages ont été délimités par Didizuka & Duarb Du. Cependant, comme pour eux, il s'est approprié cet univers très particulier sans renier l'essence de son style. Après tout, c’est toute l’idée du projet que d’avoir plusieurs visions du même univers, parfois antinomiques, qui se juxtaposent.

    Mine de rien, cette démarche est délicate, car, étant celui qui chapeaute le tout, je cherche souvent le point d’équilibre entre la réinterprétation totale – ce qui fait fi de ce qui a déjà été accompli – et l’adaptation nécessaire à ce qui a été conçu en amont. Ainsi, les plus attentifs d’entre vous remarqueront le cheval mécanique de Didizuka.

    Cette exigence nous a entraînées dans de nombreux ajustements stylistiques. Du coup, MakuZoku s’est emparé de la pugnace (© Tom Larret) Allytah en opérant un ravalement de façade pour le moins radical. Je lui ai aussi suggéré de pousser d’un cran les influences gothiques avec cette tenue en cuir de djoros qui épouse ses formes généreuses. 


    Mais trêve de tergiversation, en attendant la suite, qui verra Didizuka revenir sur le devant de la scène, voici un bref extrait de la scène en question :

    « Eldridge et Tigrishka n’eurent guère le temps de récupérer leurs esprits que déjà le rugissement des vents les avalait. Elle aida le chevalier défiguré à se redresser. Eldridge s’appuya sur elle en grondant puis pinça son nez brisé. Il souffla un jet noir enflammé de substance coagulée. Une vague de souffrance s’étendit en toile d’araignée froide à la jointure de ses sourcils. Tigrishka l'observait avec dans ses yeux violets une sollicitude qu'il ne pensait pas y trouver.

    — Ça va, chevalier ?
    — Ça ira ! Faut y aller ! D’un geste il indiqua la clairière ou les combats s’achevaient. Il faut les emmener à l’abri de la tempête.

    Il éprouvait les plus grandes difficultés à parler, mais le pire était son œil gauche enkysté dans sa coque de peau enflée, incapable de discerner quoi que ce soit. Il espérait que cette cécité n’était que temporaire, mais il n’avait guère le loisir de s’y attarder. Cahin-caha, ils débouchèrent sur le champ de bataille où les derniers ennemis étaient neutralisés. Allytah avait déjà pris la tête de ses troupes, distribuant les ordres avec efficacité. Chacun s’attelait à évacuer les lieux. Elle jeta un coup d’œil sur le couple qui émergeait du chemin.

    — Vite ! les héla-t-elle. Il est plus que temps de foutre le camp d’ici ! Elle leur adressa un geste de son bras d’acier. On n’a que trop traîné dans le coin !
    — Mais, et les cadavres des nôtres ?

    La question venait du Dauphin qui attachait Schiscrim dans le chariot malmené par la bataille entre Snabbay et les doncykus. L’Hyksos, toujours sous sa forme lupine, sa robe d'albâtre poisseuse d'excoriation pourpre et noire dégorgeant de lourdes gouttes de sang artériel, approcha son mufle vers l'adolescent qui soutint la vision des crocs jaunâtres maculés de sanie organique.

    — On n'a pas le temps de leur donner les libations qu’ils mériteraient ! grogna-t-elle. On priera pour leur âme plus tard, maintenant, on doit décamper !

    Les monstrueux bras griffus s’emparèrent du Dauphin pour le hisser sur son épaule. Depuis son promontoire, il vit Heldar d’Avon se pencher en direction de Labouk qui gisait la face dans la neige. Le vieux paysan exécuta la gestuelle des quatre directions de ses doigts, puis il se saisit de la longe pour monter sur le dos d’Orage qui accepta sa charge sans protester.

    Allytah se rapprocha de Snabbay, appréciant d’un œil les impressionnantes balafres qui zébraient le torse de l’Hyksos. La gueule de la Noctule se plissa en une moue tracassée.

    — T’es sûre que ça va aller ?
    — Ne t’inquiète pas pour moi ! La louve souffla un large nuage de condensation dans l’atmosphère qui se rafraîchissait à vue d’œil. Ça guérira. Les choses auraient pu être pires si ces bâtards avaient possédé des armes en argent !

    Allytah hocha la tête d’un air entendu puis enfourcha Foudre. Elle envoya un geste à l’intention de la caravane. La vague de gel fondait sur la canopée, congelant les aiguilles de lacicriox, glissant sur les branches des effreuls en des ondulations serpentines. La blancheur de l’humeur exsudée par la mucosité glaciale contrastait avec l’immense œil noir qui les surplombait, les contemplant avec une avidité infinie, impatiente de transpercer les chairs. Une brusque bourrasque manqua d'emporter les cynocéphales qui encadraient Eldridge et Tigrishka qui se hâtèrent à leur tour, fuyant cette haleine tranchante.

    Bientôt toute la bande dépenaillée, blessée, courut à toute allure. Les rafales décapitaient les troncs les plus hauts dans des miaulements terrifiants. Le grondement se métamorphosa en un hululement assourdissant. Les ténèbres aériennes avalèrent d’une seule bouchée les migrants. Les premières bombes de glace sifflèrent autour d’eux, puis pulvérisèrent des arbres centenaires, entraînant dans leur explosion des apocalypses arboricoles. Eldridge aboya des ordres aux cynocéphales dont les sens étaient débordés par la symphonie destructrice qui les environnait. Il canalisait la panique des canins en leur dispensant des encouragements, abritant sous les pans de son manteau les retardataires terrifiés. Tigrishka esquiva un tronc de plus de soixante pieds qui basculait dans un grincement sinistre. Les branches du vieillard monstrueux manquèrent de peu de balayer des cynocéphales que Tigrishka embarqua dans ses bras, les crochetant avec ses griffes.

    — Vite, vite !

    Elle s’époumonait dans le mur d’air gelé qui l’assaillait de toute part et étouffait même son odorat. Ses vibrisses souffraient le martyr, et elle craignait qu’elles ne se brisent comme du verre, congelées par l’action de cette redoutable vague de froid. Elle accéléra le rythme. Les poings de glace s’abattaient partout autour d'eux, les traquant avec une obstination qui finirait par l’emporter sur leur course échevelée. Elle n’eut même pas le loisir de chercher du regard Eldridge, prisonnière de la gangue de blancheur qui la cernait de toutes parts.

    À la tête de la colonne, Allytah avalait le chemin le plus vite possible sur Foudre, mais elle se rendait compte qu’elle ne parviendrait jamais à atteindre le Relai Ranfoyt qui jouxtait le Sentier des Pendus. Son œil fouillait, désespéré, les sous-bois noyés dans la chape de nacre. Les boules de glace s’écrasaient dans des explosions cristallines, brouillant encore un peu plus ses perceptions dans des paillettes de gel. Qu’un seul de ses obus la frappât, et son crâne éclaterait comme une calebasse trop mûre. Elle prit une piste à peine esquissée, un chemin de tangente pour se diriger vers une mince voie de salut. Une manœuvre de sauvetage se dessina dans son esprit alors qu'elle poursuivait sa fuite désespérée. Elle se pencha sur l’oreille de ferraille de Foudre. Le boucan des éléments mangeait ses mots. Elle hurlait de tous ses poumons, ses bronches griffées par l’air congelé des bourrasques qui la giflait de toutes parts.

    — Quand on sera arrivé là-haut…

    Elle désigna une anfractuosité dans un nœud de géants de trois immenses lacricioxs qui avaient grandis emmêlé, puis chu ensemble des décennies auparavant.

    — … Est-ce que tu peux déclencher l’ordre 06-DC-4F ?
    — Cela nous demandera beaucoup d’énergie, grésilla la voix électrique de Foudre. Mais oui, nous le pouvons. La toile protectrice atteindra quatre-vingts Klas de surface.
    — Parfait !

    Allytah éperonna sa monture. Elle se retourna pour beugler ses instructions à ses compagnons quand une bombe de gel se jeta droit sur elle, emportant dans son sillage d'épais branchages. Allytah dégaina son revolver et tira sur le projectile meurtrier en un clignement d’œil. La sphère cristalline explosa en une myriade d'esquilles coupantes à quelques pouces du crâne de la Noctule. Tenant toujours le cheval sous ses cuisses, elle vida le magasin de son arme et rechargea en une succession de gestes rapides, avant de le refermer le barillet d'un mouvement sec du poignet. Elle décocha six autres projectiles dont les traits brillèrent dans la tourmente. Les perles de gel qui fondaient sur ses gens éclatèrent et les shrapnels gelés étaient dispersés par les bourrasques. Allytah alimenta une seconde fois son revolver et lâcha une nouvelle bordée sur les menaces aériennes qui ciblaient la caravane. Elle hurla, avalant un air qui lui coupa la trachée, lui procurant l’impression qu’une myriade de chirurgiens fous disséquaient ses poumons.

    — Plus vite ! On a un abri ! »